L’intérêt de notre travail exige que l’on montre au fur et à mesure le degré d’influence mutuelle entre les administrateurs coloniaux allemands et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun. Ce travail propose d’analyser les dynamiques et les logiques d’implantation et de domination que l’administration coloniale allemande a eue sur ces deux entités politiques traditionnelles. Par ailleurs, l’administration coloniale allemande a dû s’adapter aux réalités locales des pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun.
Pour illustrer ce travail, le recours à une double approche méthodologique a été impératif : l’approche historique nous permettra de retracer la période coloniale allemande au Cameroun, mais aussi à travers la diachronie et la synchronie, d’apprécier l’influence que la colonisation allemande a eue sur les sociétés traditionnelles Duala et Bamoun.
De 1884 à 1916, les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Douala ont été soumis à l’influence de l’administration coloniale allemande. Cela s’est manifesté par la restructuration profonde de leurs organisations politiques, économiques et socioculturelles. Dans cette perspective, nous sommes allés plus loin en démontrant que l’administration coloniale allemande a également subi des mutations significatives du fait de leurs échanges avec le Sultan NJOYA et les chefs Duala.
Table des matières
Résumé:
Abstract:
INTRODUCTION
1. CONSTRUCTION DE L’OBJET D’ÉTUDE
2. CONTEXTE ET JUSTIFICATION DU SUJET
3. CLARIFICATIONS CONCEPTUELLES
4. PRÉSENTATION DES POUVOIRS POLITIQUES TRADITIONNELS DUALA ET BAMOUN
5. DÉLIMITATION DU SUJET OU BORNAGE DE L’ÉTUDE
6. REVUE CRITIQUE DE LA LITTÉRATURE PROBLÉMATIQUEET HYPOTHÈSES
7. INTÉRÊT DE L’ÉTUDE
8. CONSIDÉRATIONS MÉTHODOLOGIQUES ET OPÉRATOIRES
9. LES MÉTHODES D’ANALYSE
10. LA TECHNIQUE DE COLLECTE DES DONNÉES
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Résumé:
De 1884 à 1916, les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Douala ont été soumis à l’influence de l’administration coloniale allemande. Cela s’est manifesté par la restructuration profonde de leurs organisations politiques, économiques et socioculturelles. Dans cette perspective, nous sommes allés plus loin en démontrant que l’administration coloniale allemande a également subi des mutations significatives du fait de leurs échanges avec le Sultan NJOYA et les chefs Duala. Aussi, nous nous sommes intéressés à ce phénomène sociopolitique sous le thème: «L’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun: Analyse de l’histoire politique du Cameroun».
L’intérêt de notre travail exige que l’on montre au fur et à mesure le degré d’influence mutuelle entre les administrateurs coloniaux allemands et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun. Ce travail propose d’analyser les dynamiques et les logiques d’implantation et de domination que l’administration coloniale allemande a eue sur ces deux entités politiques traditionnelles. Par ailleurs, l’administration coloniale allemande a dû s’adapter aux réalités locales des pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun.
Pour illustrer ce travail, le recours à une double approche méthodologique a été impératif: l’approche historique nous permettra de retracer la période coloniale allemande au Cameroun, mais aussi à travers la diachronie et la synchronie, d’apprécier l’influence que la colonisation allemande a eue sur les sociétés traditionnelles Duala et Bamoun.
L’approche comparative visera à mettre en évidence la manière dont les colons allemands sont entrés en contact avec les chefferies traditionnelles suscitées, et comment ces dernières ont participé positivement ou négativement à l’expansion de cette conquête. Ensuite, elle nous permettra de nous de se demander où se trouve la pertinence d’une telle ouverture pour la transformation et l’évolution de ces sociétés traditionnelles au fil du temps. Enfin, de savoir si tous les acteurs de cette période coloniale ont pu être mis en lumière ainsi que leurs rôles exacts.
C’est sur cette base que notre travail a été construit en deux parties. La première partie est titrée: «La domination de l’administration coloniale allemande sur les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun» et la seconde partie quant à elle est intitulée: «L’influence relative des pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun sur l’administration coloniale allemande».
Abstract:
From 1884 to 1916, the traditional powers Duala and Bamum were subject to the influence of the German colonial administration. This was manifested in the profound restructuring of their political, economic and socio-cultural organizations. In this perspective, we went further by demonstrating that the German colonial administration has also undergone significant changes as a result of their exchanges with Sultan NJOYA and Duala chiefs. We have also being interested in this socio-political phenomenon under the theme: «The German colonial administration and the traditional powers Duala and Bamum: Analysis of Cameroon’s political history».
The interest of our work demands that the degree of mutual influence between the German colonial administration and the traditional political powers Duala and Bamum be gradually shown. This work proposes to analyze the dynamics and the logics of implantation and domination that the German colonial administration had on these two traditional political entities. Moreover, this same German colonial administration had to adapt to the local realities of the traditional Duala and Bamum political powers.
To illustrate this work, a double methodological approach was imperative: the historical approach allow us to retrace the German period in Cameroon but also through diachrony and synchronicity, to appreciate the influence that German colonization had on the traditional Duala and Bamum societies.
The comparative approach will aim to highlight the way in which the German colonists came into contact with the traditional chieftaincies that were created, and how the latter participated positively or negatively in the expansion of this conquest. Second, it will allow us to ask where the relevance of such an opening lies for the transformation and evolution of these traditional societies over time. Finally, to know if all the actors of this colonial period could be brought to light as well as their exact roles.
It is on this basis that our work was builtin two parts. The first part is entitled: «The domination of the German colonial administration over the traditional political powers of Duala and Bamum» and the second part is entitled: «The relative influence of the traditional political powers of Bamum and Duala on the German colonial administration».
Mots-clés: administration coloniale allemande, pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Douala, histoire politique.
Keywords : German colonial administration, Bamum and Duala traditional political powers, Political history.
INTRODUCTION
Le Cameroun1, situé au fond du Golfe de Guinée, fut d’abord visité par les Portugais au 15ème siècle, puis par les Britanniques et les Allemands qui y amenèrent les premiers missionnaires vers 1860. Devenu colonie allemande en 1884, il passa sous la coupe de la France du lendemain de la Première Guerre Mondiale en 1919. Pays de 475650 Km² et de 25 millions d’habitants, le Cameroun s’étend des rivages de l’Océan Atlantique aux confins du Sahel. En 1911, les Français cèdent certains de leurs territoires d’Afrique Équatoriale aux Allemands, que ces derniers baptisent aussitôt «Neu Kamerun». Le territoire du «Kamerun» va donc s’agrandir d’une partie du Congo cédée par la France, appelé le «bec de canard», car il donnait accès au fleuve Congo.
Pour Ibrahim MOUICHE, le Cameroun situé géographiquement à la charnière de l’Afrique occidentale, centrale comme des ensembles sahélien et occidental, culturellement à la jonction des mondes francophone et anglophone, aussi bien chrétien que musulman. En ce sens, il est le carrefour des trois importantes régions culturelles: la côte de Guinée avec ses peuplades négritiques, le Soudan occidental avec les Peul et les peuplades arabes, le Congo avec les peuples de langue bantoue. L’extrême complexité ethnique est à l’image à celle de l’Afrique2.
C’est essentiellement autour de l’estuaire du Wouri que se déroulera le trafic le plus important. Les lieux de traite sont restés facilement identifiables. Il y avait surtout les villages qui se situaient le long de la côte autour de Victoria, puis les villages Malimba, de l’estuaire du Wouri. Le gros du trafic se passait à Douala et Bonabéri aux lieux dits Kamerun et Hickory Town. Sur les côtes du Cameroun comme partout en Afrique, la traite a été un véritable commerce de troc. Les échanges étaient faits au moyen de coquillages asiatiques qui servaient de monnaie, de pièces de tissu, de barres de fer, objets manufacturés et de pacotille. Les comptoirs du Cameroun étaient reliés aux autres comptoirs du Sénégal, de Sierra-Léone, du Libéria, du Ghana, de Côte-D’ivoire, du Nigéria. Au cours du 16ème siècle, le trafic est surtout aux mains des Espagnols.
Mais à partir du 17ème siècle, il devient l’affaire des Hollandais puis des Français et des Anglais. Le monopole passe aux mains des Anglais au 18ème siècle. C’est l’époque où s’organise le commerce triangulaire.
Les chefs côtiers ont joué un rôle particulièrement important. Le Révérend Pasteur MVENG écrit: «Selon la coutume de l’époque, on rassemblait les esclaves au passage des navires. Là où les chefs servaient d’intermédiaires, la traite s’ouvrait par un cérémonial minutieux: annonce de l’arrivée du bateau, invitation du chef à bord, réception au village et présentation des cadeaux, enfin, proclamation de l’ouverture de la traite» 3. Les chefs côtiers étaient très friands des cadeaux apportés par les marchands européens. Sur la côte du Cameroun, on pouvait acheter des esclaves pour 8 ou 10 bracelets de cuivre. Certains de ces bracelets, les «manilhas», ont été conservés au musée de Douala. Le vin d’Espagne et les cauris étaient très prisés…
Au 17ème siècle, on sait que les Duala étaient partis de Pitti, sur la Dibamba pour venir habiter la zone actuelle. Mais un fait caractéristique est que l’on ne voit pas ces chefs pratiquer ce commerce au grand jour. Tout laisse croire qu’au cours du 16ème siècle, les Portugais retiraient des côtes camerounaises une moyenne de 500 esclaves. On peut noter que les ressortissants camerounais étaient peu aptes à la condition servile4. Le cas de l’esclavage touchait au système de l’organisation sociale tout entière. Toutes les tribus du Cameroun avaient des esclaves qu’on appelait par exemple, «Mokomi» chez les Kpé de l’ex-Cameroun britannique, «Mukom» chez les Duala, «Nkol» chez les Bassa, «Olo-Etuga» chez les Fang-Béti, «Yond» et autres, chez les Banen5. L’ambition de cette étude, intitulée «L’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun: analyse de l’histoire politique du Cameroun», est de comprendre que les sociétés Duala et Bamoun ont bénéficié de l’expertise et du savoir-faire de l’administration coloniale allemande. Par ailleurs, il est également question de voir que la colonisation allemande a permis de considérer que le Cameroun était une zone à exploiter, et que les populations allaient servir de main d’œuvre à cette opération.
D’un point de vue pragmatique, les Allemands ont créé de grandes plantations de produits d’exportation dont le cacao, le café, l’huile de palme, etc. La signature des différents traités permettait ou n’autorisait pas à occulter la dimension brutale des méthodes employées pour atteindre leurs objectifs. Et l’épisode des multiples révoltes dans les plantations allant même jusqu’à la grève de l’impôt, témoigne de ces tensions entre les Allemands et les populations camerounaises.
Toutefois, l’administration coloniale allemande a contribué au désenclavement du Cameroun à travers l’exportation des produits cultivés. Il s’agit donc de voir de quelle manière les chefs traditionnels, en particulier ceux Duala et Bamoun, ont participé et ont subi l’expansion de la conquête allemande au Cameroun.Négliger cet aspect, c’est oublier que tous les acteurs ont eu à mettre en lumière différents angles et aspects de la colonisation aussi glorieux qu’obscurs.
Notre article porte sur la construction de l’étude (I-) et les considérations méthodologiques et opératoires du sujet précité (II-).
1. CONSTRUCTION DE L’OBJET D’ÉTUDE
D’après Pierre BOURDIEU, «construire un objet scientifique, c’est, d’abord et avant tout, rompre avec le sens commun, c’est-à-dire des représentations partagées par tous, qu’il s’agisse des simples lieux communs de l’existence ordinaire ou des représentations officielles, souvent inscrites dans des institutions, donc à la fois dans l’objectivité des représentations sociales et dans les cerveaux. Le préconstruit est partout» 6 . L’objet scientifique est le fait à observer, pour saisir et rendre visibles les aspects imperceptibles de sa nature à l’œil nu.
Cela suppose aussi dans une certaine mesure, soit de rompre avec certains fondements anciens, soit encore de les revisiter pour en faire une nouvelle structure. C’est dire autrement qu’il faut appréhender son essence, situer son intérêt, définir ses limites et sa forme, identifier ses problèmes et les solutions y afférentes, pour mieux situer sa valeur. En effet, l’administration coloniale allemande a assis sa domination sur les entités locales, notamment sur les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun en appliquant le principe «de diviser pour mieux régner».
Dans ce cadre, on a plusieurs fois recensé l’utilisation des antagonismes existant entre le Roi BELL et le Roi AKWA par les autorités allemandes pour avoir la main mise sur le commerce et autres transactions commerciales. De plus, les chefs Duala se sont opposés à la politique d’expropriation, soit en conduisant des attaques armées, soit en adressant de nombreuses pétitions au Parlement allemand. Ce qui conduira le 08 août 1914 à la pendaison du Roi Rudolf DUALA MANGA BELL et de son secrétaire NGOSSO DIN. Au sein du royaume Bamoun, par contre, on assiste plutôt à une politique plus conciliatrice. Le Roi NJOYA utilise la ruse, l’échange de cadeaux, la création d’un syncrétisme religieux pour ne pas perdre la main face aux Allemands. D’ailleurs, les guerriers Bamoun participeront à la conquête de leurs frères Bansoh, et récupéreront par la même occasion, la tête du Roi NSANGOU.
Toutefois, il ne faut pas considérer que ces adaptations n’ont été que le fait des pouvoirs locaux. A ce titre, le pouvoir colonial allemand, a fait lui aussi, des compromis pour asseoir sa suprématie. S’agissant de la politique foncière, les autorités coloniales allemandes vont retarder à tout prix le processus de réparation des dommages causés par l’expropriation forcée des terrains du plateau Joss entre autres. La multiplication des pétitions et des indemnisations financières en est un témoignage flagrant. Mais la situation sera de plus en plus tendue, d’autant que la bourgeoisie Duala, ayant étudié en Allemagne, connait ses droits et les réclame avec véhémence. A ce titre, Rudolf DUALA MANGA BELL mène les opérations de résistance; il est également soutenu par les autres chefs malgré les tentatives de déstabilisation de cette union par les Allemands, s’arroge même l’approbation d’une tranche de l’opinion publique allemande notamment chez les sociaux-démocrates, réputés proches des idées socialistes et du respect des peuples dits opprimés. Cependant, il le paiera au prix de sa vie et cet état de fait consacrera le problème foncier encore en vigueur, de nos jours, sur le territoire «Duala».
Concernant la chefferie Bamoun, le pouvoir colonial allemand se heurtera aux traditions séculaires telles que la polygamie ou les pratiques animistes qui existent encore aujourd’hui, preuve qu’aucune colonisation n’a pu totalement éliminer ces éléments dits «rétrogrades».
Les missionnaires allemands seront obligés de tolérer la polygamie tant que les futurs adeptes au christianisme, acceptaient de se faire baptiser, ou d’amener les autres profanes à accepter l’école occidentale, à détruire leurs fétiches devant témoin par exemple. De plus, ils seront surpris de l’intelligence, de l’audace du Roi NJOYA. Un roi «nègre», qui créé une écriture, un système de cultures, une religion syncrétique, une architecture mêlant des styles différents.
En d’autres termes, le Roi NJOYA remit en doute toutes les conceptions racistes et hégémoniques des colonisateurs de quelque bord qu’ils soient. Les Allemands reconnaitront son génie, son organisation, et sa capacité à fédérer son peuple autour de lui et de ses idéaux.
Ainsi, les institutions politiques africaines à savoir les chefferies traditionnelles ont su se pérenniser et survivre face aux bouleversements de la colonisation et de l’Etat moderne africain par le biais d’un ensemble de transformations et d’adaptations. Elles font partie des institutions de l’ère coloniale et postcoloniale et sont animées aujourd’hui d’un dynamisme qui les intègre à la vie politique nationale.
2. CONTEXTE ET JUSTIFICATION DU SUJET
C’est en 1884 que BISMARCK décide d’engager une politique d’expansion coloniale7. Mais déjà au début du mois d’avril 1883, à l’occasion d’une convention signée le 28 juin 1882 et publiée en mars 1883 – par laquelle l’Angleterre et la France garantissaient réciproquement des droits égaux à leurs commerçants dans leurs possessions africaines - le Chancelier avait demandé à son ministre des Affaires étrangères, le comte HATZFELD, de faire remettre aux magistrats des villes hanséatiques une note les invitant à proposer des mesures pour favoriser l’expansion du commerce allemand sur la côte occidentale d’Afrique.
Le 9 juillet 1883, le Sénat de Brême recommande deux mesures essentielles: la conclusion de traités de commerce avec les chefs indigènes; la formation d’une escadre chargée de visiter régulièrement les comptoirs allemands pour faire impression sur les indigènes et pour les intimider. Il n’était absolument pas question d’annexions territoriales8.
Quant à la Chambre de commerce de Hambourg, présidée par le célèbre négociant Adolf WOERMANN, qui avait des intérêts sur la côte occidentale d’Afrique, elle adressa à BISMARCK, le 6 juillet 1883, un long et intéressant mémoire9. Ce mémoire montrait la valeur des établissements coloniaux que l’Allemagne pourrait fonder à l’embouchure du Niger et dans la baie de Biafra10.
Par ailleurs, il s’opposait à la fondation des colonies de peuplement, mais recommandait avec insistance l’acquisition de comptoirs et de territoires d’exploitation comme très favorable aux intérêts commerciaux de l’Allemagne. Ce mémoire plut à BISMARCK que le Chancelier en accepta intégralement le programme et le 22 décembre 1883, le comte HATZFELD par le biais de M. WENTZEL, annonçait qu’un commissaire impérial allait être désigné pour se rendre en Afrique et engager des négociations avec des souverains indigènes dans différentes parties de la côte occidentale.11
Le gouvernement allemand envoya ainsi Gustave NACHTIGAL12 négocier la mise sous protectorat avec les chefs Duala. Deux traités en ce sens furent signés avec des chefs de l’estuaire du Wouri appelée « Cameroon River » par les Britanniques. Ces traités furent appelés traités Germano-Duala. Le premier de ces traités qui date du 12 juillet 1884 marque la naissance internationale du Cameroun moderne.
Douala fut tout d’abord choisie pour abriter la résidence des gouverneurs et le siège du gouvernorat, de 1885 à 1901, puis ce fut le tour de Buéa, de 1901 à 1909, au climat plus frais et choisie par le Gouverneur VON PUTTKAMER. L'éruption du Mont Cameroun qui eut lieu en 1908 mit prématurément fin à ce choix. Ce fut de nouveau le retour à Douala où les Allemands se heurtèrent cette fois-ci à la révolte des Duala qui refusaient de se laisser expulser de leurs terres. Des révoltes éclatèrent dans les plantations et dans la région de Douala, allant même jusqu'à la grève de l'impôt. Néanmoins, la maitrise allemande ne fut pas remise en cause par ces évènements. En dehors de la période de la signature du traité Germano-Duala, les Allemands rencontrèrent de la résistance et des révoltes dans leur tentative de conquête de l'arrière-pays du Cameroun. Les Allemands se firent aider dans cette entreprise par certains chefs traditionnels dont les plus célèbres furent le Fon GALEGA 1er de Bali, le Sultan Bamoun Ibrahim NJOYA, et Charles ATANGANA qui fut plus tard nommé «Oberhauptling» c'est-à-dire «chef supérieur» des Yaoundé et Bane.
Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la relation existante entre ces deux phénomènes. D'une part, on a assisté, à une politique de résistance à l’égard de l'administration coloniale allemande de la part des peuples Duala et Nsoh13, entre autres. Cette théorie mise en exergue par les perspectives marxiste ou nationaliste évoquait à juste titre de la résistance des chefs contre le système d'oppression coloniale. Ici, la stratification sociale qui renvoie à plusieurs processus sociaux de distinction, de discrimination, d'affiliation, de «pecking order»14, tend à positionner les individus de façon hiérarchique, dans une société ou une organisation sociale donnée, et donne lieu à des inégalités sociales, en termes d'accès et de répartition des ressources.
Le marxisme associe à cette vision de la stratification de la société la notion historique de «lutte des classes». Pour Karl MARX et Friedrich ENGELS, l'histoire n'est qu'une succession de lutte entre classe dominante et classe dominée. Ils associent à la classe dominée le prolétariat et à la classe dominante la bourgeoisie.
Ils écrivent que les prolétaires ne peuvent pas être assujettis à une patrie en particulier et que les divisions étatiques, nationales et/ou culturelles qui les opposent, sont de simples diversions en regard du conflit central: la lutte des classes qui oppose le travail au capital dans le cadre mondialisé du capitalisme15. Pour ces deux auteurs, la lutte des classes est un moteur des transformations des sociétés et de l’histoire moderne16. En effet, bien que les Allemands, soutenus par les Bali, aient imposé leur autorité sur la plupart des tribus des Grassfields de Bamenda par des expéditions punitives et des campagnes militaires comme à Bafut, les Nsoh s'opposèrent toujours à la domination coloniale allemande.
Les Allemands reçurent l'aide des Bamoun pour vaincre les Nsoh et ils les écrasèrent en 1906 et leur imposèrent des termes de la paix. Suivant cet accord pacifique, les Nsoh se soumirent à l'autorité allemande, et, ensuite, renvoyèrent le crâne du Roi NSANGOU aux Bamoun. Quant aux Duala, la première opposition majeure survint en décembre 1884 avec d'un côté le Roi BELL, qui avait soutenu l'annexion allemande et de l'autre, les autres chefs et princes de Josstown et d'Hickorytown. Cette hostilité provenait principalement du fait que les Allemands voulaient procéder à l'expropriation des terrains, ce qui n'avait pas été convenu entre les deux parties lors de la signature du traité Germano-Duala du 12 juillet 1884.
D'autre part, on a également assisté à une politique de collaboration avec l'administration allemande au Cameroun. Cette théorie de la collaboration a été élaborée par Ronald ROBINSON, théorie selon laquelle les facteurs collaborationnistes17 ont largement contribué à la domination des peuples colonisés.
ROBINSON pose le problème ainsi qu’il suit : «Les notions anciennes se limitaient pour la plupart à expliquer la genèse des nouveaux empires coloniaux en termes de circonstances en Europe. La théorie du futur devra expliquer comment une poignée de proconsuls européens ont réussi à manipuler les sociétés polymorphes d’Afrique et d’Asie et comment des élites nationalistes, finalement relativement petites, les ont persuadés de partir» 18.
Donald Anthony LOW donne la même orientation à l'interprétation de l'impérialisme colonial lorsqu'il pose la question de savoir comment l'ordre colonial a pu être accepté pendant si longtemps19.
La recherche historique sur la colonisation allemande au Cameroun connait indiscutablement un grand intérêt avec les travaux de Karin HAUSEN20, Albert WIRZ et Gotthilf WALZ21 mais elle semble généralement effectuée dans une perspective plus ou moins euro-centrique22. Les travaux du professeur STOECKER23 et de ses collaborateurs donnent une autre orientation à cette recherche, à savoir qu’il est indispensable, non pas d’analyser le phénomène colonial en se référant en majeure partie au colonisateur, mais plutôt d’accorder une place importante au colonisé. La thèse de Patrice MANDENG se situe dans le même cadre.
Nous orientons notre travail vers cette voie où le colonisé, dans ce cas le chef, n’est plus seulement objet mais aussi sujet dans le processus colonial. D’où une convergence entre la théorie de ROBINSON et les études de STOECKER et de MANDENG24. Il convient donc de mettre un accent particulier sur les éléments locaux de la domination coloniale. Il s’agit ici pour nous d’analyser les éléments collaborationnistes locaux, indispensables au maintien de l’ordre colonial et de faire ressortir la part de responsabilité incombant à une certaine couche de la population colonisée25. Bien que les cas de coopération avec les chefs amis ne fussent pas très nombreux, le Fon GALEGA 1er de Bali, Charles ATANGANA et le Sultan NJOYA en font partie. Le Roi Ibrahim NJOYA, qui avait entendu parler des expéditions punitives et des campagnes de destruction contre les tribus rebelles des Grassfields, accueillit les Allemands en 1902.
Il évita la guerre en négociant avec les Allemands. Il ouvrit son pays aux innovations politiques et économiques qu'ils proposaient pour ne pas être démis de son pouvoir. En 1906, NJOYA apporta son soutien aux Allemands dans le conflit contre les Nsoh qui refusaient de se soumettre à l'autorité de la station militaire de Bamenda. L'expédition fut un succès et l'autorité allemande s'imposa chez les Nsoh. En retour, NJOYA utilisa les Allemands pour renforcer sa position, éliminer ses rivaux du lignage royal et de la Cour.
L'objectif du pouvoir colonial était, entre autres, de collaborer avec ces chefs pour mieux contrôler les populations, de s'imposer comme unique autorité politique dans la colonie, et selon René PHILOMBE, poète et écrivain camerounais26, les chefs furent utilisés par ce qui a été appelé la «sombre trinité», c'est-à-dire par l'administrateur, le missionnaire et le commerçant ou planteur. En même temps, l’on ne devrait pas occulter l’influence certaine, certes relative de ces chefs sur l’administration coloniale allemande.
Tel est le bloc d'idées à partir duquel s'est construit l'objet de cette étude. Ce qui impose le préalable de la définition des concepts.
3. CLARIFICATIONS CONCEPTUELLES
Parce que les mots ne transmettent pas toujours avec exactitude l’état de conscience que nous vivons, le chercheur, doit, suivant le conseil d’Émile DURKHEIM, définir les choses dont il traite, afin que l’on sache exactement de quoi il est question27. Cet exercice permet également d’empêcher à l’objet d’étude de fuir dans tous les sens, gage de son opérationnalisation aisée.
La clarification des concepts n’est autre chose qu’un exercice de conceptualisation. A ce sujet, Raymond QUIVY et Luc VAN CAMPENHOUDT écrivent ce qui suit: « La conceptualisation est plus qu’une simple définition ou convention terminologique. Elle constitue une construction abstraite qui vise à rendre compte du réel» ... A cet effet, elle ne retient pas tous les aspects de la réalité concernée, mais seulement ce qui exprime l’essentiel du point de vue du chercheur. Il s’agit donc d’une construction-sélection» 28 .
Émile DURKHEIM trouve qu’avant toute chose, il faut s’accorder sur le sens à donner aux mots, aux concepts, ces derniers étant très souvent polysémiques. C’est ainsi qu’il est utile de procéder à une définition des termes clés usités, afin de préciser les sens qui ne nous seront d’aucune utilité et éviter tout malentendu qui pourrait naître d’une quelconque interprétation contraire à l’orientation donnée dans ce travail29.
Nous allons proposer la définition à certains concepts clefs sans toutefois négliger les dérivés et mots voisins qui les accompagnent : administration, pouvoirs politiques traditionnels, histoire politique, afin que l’on sache exactement de quoi il est question.
1. Le concept d'administration
Nous allons procéder à la définition du mot «administration» et pour des besoins de précision, nous allons aborder certains de ses éléments connexes: gestion, management.
a) Administrationcoloniale
Le mot «administration» peut revêtir deux sens différents. Si l'on s’attache à la fonction de l’administration, suivant la définition fonctionnelle, le mot désigne l’ensemble des activités dont le but est de répondre aux besoins d’intérêt général de la population30 tels qu’ils sont définis à un moment donné par l’opinion publique et le pouvoir politique.
Il s’écrit alors avec un petit « a ». Mais, si on s’attache à son organisation, suivant la définition organique, il désigne l’ensemble des personnes morales31 et physiques32 qui accomplissent ces activités.
Le mot «administration» s’écrit alors avec un grand « A ». Il existe là encore deux approches : une conception large qui considère que les organismes privés chargés d’une action administrative font partie de l’administration, et une conception restreinte qui les exclut. Administrer revient à gouverner, diriger, ordonner ou organiser. Il est important de souligner que sous l’angle anthropologique ou sociologique, l’histoire du colonialisme allemand est empreinte du fait que les colonies ne seront jamais des terres de relégation de délinquants ou de criminels ou encore d’opposants politiques comme ce fut le cas pour la Grande-Bretagne. Dans ce contexte, les colons allemands sont des migrants volontaires, pour la plupart des employés et agents des sociétés coloniales, des fonctionnaires impériaux ou des commerçants.
L’administration coloniale allemande était donc volontariste et le mot « administration - ou administration publique » peut être appréhendé comme l’ensemble des services chargés d’assurer le fonctionnement d’un État, d’une collectivité territoriale ou d’un service public, et qui sont financés principalement par des prélèvements fiscaux autorisés par le vote d’un budget, « corps des fonctionnaires chargés collectivement de quelque partie de l’administration publique ».
L’administration coloniale allemande était chargée d’appliquer la politique ou de mettre en œuvre la colonisation de la puissance colonisatrice sur la colonie. Elle a mis sur pied le recrutement de la main d’œuvre locale pour construire «ses» infrastructures, déployer ses agents sur le terrain tels que les missionnaires et les fonctionnaires, de diffuser la langue allemande au détriment des langues locales, de transformer les mentalités «sauvages» en mentalités «soumises» au travers du christianisme et des écoles confessionnelles, d’occulter les effets pervers de la colonisation à travers la manipulation des Saintes Écritures. On peut citer entre autres le travail forcé, les abus physiques et sexuels, la diabolisation accrue des pratiques mystiques africaines, le pillage des ressources, etc.
b) Gestion
Du latin «gestĭo», le concept de gestion se réfère à l’action et à l’effet de gérer ou d’administrer. Gérer, c’est prendre des mesures conduisant à la réalisation d’une affaire ou d’un souhait quelconque. Le terme «gestion» concerne donc l’ensemble des procédures effectuées pour résoudre un problème ou réaliser un projet33. La gestion est également la direction ou l’administration d’une entreprise ou d’une affaire.
Il existe plusieurs types de gestion. La gestion sociale, à titre d’exemple, consiste à construire divers espaces d’interaction sociale34. La gestion correspond, à l'origine, à l'administration des organisations. Elle s'est développée dans les années 1950 pour englober les questions de management et de direction.
La gestion renvoie à la conduite des organisations : c'est l'action ou la manière de gérer, d'administrer, d'organiser quelque chose. En somme, la gestion c'est l'ensemble des connaissances permettant de conduire une entreprise. La gestion est également le management de l'action collective.
Elle fait référence à un besoin de répartir les tâches, de coordonner les individus d'une part et d'autre part à une nécessité de gérer la contrainte de temps, de gérer les ressources humaines, matérielles, financières. En ce sens, la gestion se rapproche de l’administration35.
c) Management
«Magnus – agere36 », c’est indissociablement la main et l’action. L’usage actuel du français du terme «management» est un emprunt direct au terme anglais «management». Cependant, l’Oxford English Dictionary37 mentionne que le verbe anglais «to manage» et le substantif «management» signifient en équitation «tenir en main les rênes d’un cheval». Le cadre étymologique permet de retracer les conceptions du management: «Conduire d’une main de maitre»; «Mettre la main à l’organisation»; «Tenir en main l’organisation»; «Main basse sur l’organisation»avec ses deux niveaux; et son paternalisme et son maternisme»; «La manipulation»; «Les mains reliées».
Pour Maurice OBADIA, «la plupart des gens pensent à tort, aidée en cela par une prononciation à l’américaine, que le terme de management contient le radical «man» (l’homme), lequel serait donc au centre du management. Mais c’est plutôt du côté du radical latin «manus» (la main), qu’il faut regarder» 38 . Selon Raymond Alain THIETART, le management est «un ensemble de connaissances et de façons de faire permettant de conduire une organisation, de la diriger, de planifier son développement, et de la contrôler» 39 . Jean-Louis DELIGNY ajoute d’ailleurs que «c’est un ensemble de connaissances et de savoir-faire permettant d’assurer en permanence la maitrise de la stratégie, des structures et des forces sociales de l’organisation, en cohérence avec sa culture» 40 .
En d’autres termes, le management est la mise en œuvre des moyens humains et matériels d'une entreprise pour atteindre ses objectifs. Il correspond à l'idée de gestion et de pilotage appliquée à une entreprise ou une unité de celle-ci. Lorsqu'il concerne l'entreprise tout entière, on peut généralement l'assimiler à la fonction de direction41.
Le management consiste à fixer des objectifs stratégiques et opérationnels, choisir les moyens de les atteindre, mettre en œuvre ces moyens concernant la recherche d'efficience, contrôler la mise en œuvre et les résultats obtenus et assurer une régulation à partir de ce contrôle, en matière de gouvernance. Il comprend une dimension technique42 et une dimension humaine43.
On voit bien que le management se rapproche aussi de l’administration. De ce fait, il peut arriver d’employer les concepts de gestion et de management au même titre que l’administration.
2. Le concept de pouvoirs politiques traditionnels
Nous allons procéder à la définition de l'expression «pouvoirs politiques traditionnels», et pour des besoins de clarté, nous allons aborder des notions synonymes : domination, autorité.
a) Pouvoirs politiques traditionnels
Le pouvoir est la capacité d'agir, de réaliser un objectif ou d'obtenir un effet recherché. Robert DAHL44 définit le pouvoir comme la capacité pour A (un ou plusieurs individus) d'obtenir de B (un ou plusieurs individus) ce que B n'aurait pas fait sans l'intervention de A.
En d’autres termes, il s’agit d’un individu45 qui exerce un pouvoir sur un autre individu, dans la mesure où il obtient de ce dernier des comportements, des actions, voire des conceptions que celui-ci n’aurait pas eu sans son intervention. Le pouvoir politique est un pouvoir qu'une personne ou plusieurs personnes exercent dans une société. Il existe de nombreuses manières d'exercer ce pouvoir, la plus évidente est celle du chef politique officiel d'un État.
Les pouvoirs politiques ne sont pas limités aux chefs d'État ou aux dirigeants, et l'étendue d'un pouvoir se traduit par l'influence sociale que la ou les personnes peuvent avoir, et cette influence peut être exercée officiellement ou non.
Dans l'histoire, le pouvoir politique a été utilisé nuisiblement ou d'une manière insensée. Ceci se produit, le plus souvent, quand trop de pouvoir est concentré dans trop peu de mains, sans assez de place pour le débat politique, la critique publique, ou d'autres formes de pressions correctives. Des exemples de tels régimes sont le despotisme, la tyrannie, la dictature, etc.
Pour parer à de tels problèmes potentiels, certaines personnes ont pensé et mis en pratique différentes solutions, dont la plupart reposent sur le partage du pouvoir telles que les démocraties, les limitations du pouvoir d'un individu ou d'un groupe, l'augmentation des droits protecteurs individuels, la mise en place d'une législation ou de chartes46. Selon le sociologue allemand Max WEBER, le pouvoir est « la capacité d'imposer sa volonté dans le cadre d'une relation sociale, malgré les résistances éventuelles » 47 . L'exercice du pouvoir implique de trouver des personnes qui ont une disposition acquise à l'obéissance. L'autorité est une forme de pouvoir mais ne doit pas être confondue pour autant avec le pouvoir. L'autorité désigne la capacité d'un individu à se faire respecter, en obtenant des autres des actions conformes à sa volonté. L'autorité est une qualité personnelle qui dans la relation à autrui permet d'exercer sa mission dans le cadre d'un pouvoir délégué.
La définition la plus utile, et la plus célèbre, c'est celle qu'a énoncée Max WEBER : « Le pouvoir politique, c'est le monopole de la violence légitime» 48 . La violence légitime, c'est la violence qui est reconnue par tous comme légitime, c'est à dire nécessaire au bon fonctionnement de la communauté. S'il n'y avait pas de violence dite «légitime», n'importe qui pourrait se faire justice soi-même et la loi du plus fort, ou encore du «chacun pour soi» règnerait.
Par «violence», il ne s'agit pas que d'agression physique, mais aussi et surtout de violence symbolique. Le pouvoir politique permet de distribuer plus ou moins équitablement les droits et devoirs entre les citoyens. Et cela passe par l'acceptation collective d'une autorité qui exerce cette violence légitime, c'est-à-dire cette possibilité de fixer des limites à ceux qui dépassent les règles et empiètent sur la liberté d'autrui.
Chez Thomas HOBBES49, la société organisée est une nécessité pour échapper à un état de nature qui n'engendre que la guerre et pour Jean-Jacques ROUSSEAU50, ce «contrat social» est un compromis, une régulation entre l'aspect fondamentalement social de l'Homme et sa nature qui, ici, est pensée comme fondamentalement bonne. Ici et là, il y’a l’idée de domination.
Partant de là, on peut définir «pouvoirs politiques traditionnels» comme celui exercé au sein des systèmes politiques traditionnels c’est-à-dire «ceux qui connaissent déjà un certain degré de différenciation structurelle et qui ont défini le stade de la culture politique de sujétion». La culture politique de sujétion est considérée essentiellement comme une culture politique de donner; les membres du système politique n’ont presque pas conscience de leurs droits c’est-à-dire des devoirs du système à leur égard. Dans ce contexte, le pouvoir traditionnel renvoie à l’ensemble de croyances qui confèrent à un individu, une famille ou un clan, l’autorité nécessaire à commander un groupe d’individus plus homogène et obtenir d’eux l’obéissance51.
Le pouvoir traditionnel renvoie au bout du compte à ce que Max WEBER qualifie de domination traditionnelle dans la mesure où «sa légitimité s’appuie, et qu’elle ainsi admise, sur le caractère sacré des dispositions transmises par le temps (existant depuis toujours) et des pouvoirs du chef». Le détenteur du pouvoir (ou divers détenteurs du pouvoir) est déterminé en vertu d’une règle transmise. On lui obéit en vertu de la dignité personnelle qui lui est conférée par la tradition» 52 .
Par essence, le pouvoir politique, qu’il soit moderne ou traditionnel est un bien public. Il ne s’agit pas simplement d’un «bien parmi d’autres que poursuivent hommes et femmes; en tant que pouvoir d’Etat, c’est aussi le moyen de régulation de toutes les recherches de biens, y compris le pouvoir lui-même». C’est pour cette raison qu’il s’exerce généralement suivant des normes de la société concernée. Les fondements et la légitimité du pouvoir sont consacrés par des réalités concernées.
Il s’agit, pour reprendre l’expression de Simone GOYARD FABRE, «de l’anthropologisation de la politique qui est d’abord elle de ses sources. Le pouvoir coutumier a ses normes que dévoile la coutume du pouvoir et la tradition, le système juridique et le système foncier» 53 .
Le pouvoir politique traditionnel peut être appréhendé suivant deux conceptions: la conception classique et la conception ethnocentrique. La conception classique du pouvoir traditionnel est suggérée par le courant maximaliste du pouvoir. D’après cette conception, le pouvoir traditionnel ou mieux les aspects traditionnels du pouvoir politique, peuvent être décelés dans n’importe quelle société. Il est aussi vrai que les aspects politiques du pouvoir sont décelés dans les sociétés traditionnelles à pouvoir coutumier.
Dans la chefferie «Pelende Nord», le pouvoir est contrôlé par le «Kyamvu», le grand chef coutumier et sa famille qui établissent leur autorité sur les autres considérés comme des sujets.
La politique coloniale belge au Congo s’inscrivait dans la conception ethnocentrique. En effet, l’autorité coloniale n’hésita pas de qualifier de traditionnel, le pouvoir politique détenu par le chef de secteur alors que ce dernier était une instance politique créée par elle. En fait, aux termes de l’article 1 alinéa 2 du décret royal du 05 décembre 1933, le secteur, bien que de création belge, était une institution indigène. Aussi les populations indigènes étaient-elles réparties en chefferies ou en secteurs.
Par conséquent, l’article 1 alinéa 3 du même décret royal présente l’expression «autorités indigènes». La personne du chef coutumier est vouée à un véritable culte. Une sorte de vénération dans la mesure où «il est le seul vivant qui entre en légitimité en contact avec les morts». On prétend qu’il et l’homme qui décide de la vie ou de la mort de ses sujets; l’abondance de la production agricole actuelle dépend de lui, généralement, implore les ancêtres dont il est le représentant au milieu des vivants. Il est l’incarnation du pouvoir, de l’autorité et de certaines fonctions reconnues aux ancêtres54. La chefferie comme structure politico-administrative est depuis l’époque coloniale, reconnue comme une structure organisée selon la coutume. Si les chefs ont été confirmés par le Gouverneur général ou en son nom dans l’autorité qui leur est attribuée par la coutume55, le décret royal du 06 octobre 1904 note que la chefferie indigène reconnue constitue donc en réalité un petit Etat dans l’Etat.
Mais ces entités coutumières ont perdu la pureté de leur caractère traditionnel au contact avec le pouvoir colonial qui les accepte, bon gré mal gré, et les a intégrées dans la structure de l’Etat colonial qui se veut «civilisateur», pourtant moderne. C’est le décret du 03 juin 1906 sur les chefferies indigènes qui, aux termes de l’article 1, élève la chefferie au statut d’entité administrative étatique56.
Au Cameroun, l’autorité compétente peut classer une chefferie traditionnelle du 1er ou 2ème degré en raison de son importance économique et démographique. Le Premier Ministre désigne les chefs du 1er degré. Le ministre de l’Administration Territoriale, ceux de 2ème degré et le préfet, ceux de 3ème degré. Les chefs traditionnels sous l’autorité du ministre de l’Administration Territoriale ont pour rôle de seconder les autorités administratives.
Ils transmettent à la population les directives des autorités compétentes, au maintien de l’ordre public et du développement économique, social et culturel de leurs unités de commandement. Ils recouvrent les impôts. Conformément à la coutume et lorsque les lois et règlements n’en disposent pas autrement, les chefs traditionnels procèdent à des conciliations ou arbitrages entre leurs administrés. Ils confirment leur rôle d’auxiliaires de la justice et les dispensateurs de la justice coutumière. Le nouveau statut de la chefferie complète l’intégration, par l’octroi d’avantages, de garanties d’un régime disciplinaire, et en représente la contrepartie57. Les chefs traditionnels de 1er et de 2ème degré ont droit à une allocation mensuelle fixe calculée sur la base de l’importance numérique de la population agrémentée d’une indemnité pour charge spéciale.
Les chefs peuvent prétendre comme par le passé au paiement des remises sur l’impôt forfaitaire collecté par leurs soins et à des primes d’efficacité octroyées par le ministre de l’Administration Territoriale sur proposition des autorités administratives. L’Etat assure au chef la protection contre les menaces, outrages, violences, voies de fait, injures ou diffamation dont il est l’objet en raison ou à l’occasion de ses fonctions. Il répare, dans ce cas, le préjudice subi. Le statut nouveau octroie un régime disciplinaire aux chefs. Ils peuvent faire l’objet en cas de faute dans l’exercice de leurs fonctions, d’inefficacité, d’inertie ou d’exactions à l’égard des populations, des sanctions suivantes: rappel à l’ordre, avertissement, blâme simple, blâme, suspension de la totalité d’allocation durant trois mois, destitution. Le chef doit avant toute sanction, avoir été au préalable appelé à donner des explications sur son comportement.
b) La domination
Le mot «domination» vient du latin «dominare» qui veut dire exercer la souveraineté. Dans son sens originel, le terme n'a ni connotation négative, ni positive, cela dépend de la façon dont elle est exercée.
La domination implique cependant toujours une hiérarchie des positions sociales : Dieu est défini en théologie comme dominant le monde pour le bien de ce dernier, tandis que les hommes le feraient pour leurs propres bénéfices, au détriment des hommes. Il peut aussi s'agir d'une forme locutive pour souligner l'importance d'un élément dans un environnement donné, comme dans l'expression «la montagne domine la plaine».
Selon la conception contemporaine, la domination est effectivement toujours légitimisée, aux vues des actions sociales, elle ne se rapporte pas systématiquement à une inégalité sociale. Par contre, en sciences sociales, la domination est un processus qui engendre une situation dans laquelle une identité sociale, c’est-à-dire en tant qu’individu ou en tant qu’institution, est en position d'imposer son autorité.
Ce déséquilibre structurel n'est pas systématiquement perçu comme étant inégalitaire, mais ce sont à ceux-ci que les sciences sociales se sont le plus intéressées. Depuis Max WEBER, la domination est comprise comme étant légitime, puisqu'elle repose sur la contingence d'actions sociales qui lui donnent sa légitimité sociale58. Ainsi, le voleur en se cachant de la police légitimise la domination du droit comme forme de justice dans nos sociétés contemporaines. Pour Max WEBER, on sait que le charisme est ce rare privilège, accordé par la providence à certains hommes d’Etat, qui leur permet d’exercer un commandement sur leurs semblables au nom de leurs seules qualités personnelles.
Dans cette occurrence, précise Georges BURDEAU, «le chef est à lui-même son propre principe de légitimité. Il n’est plus seulement l’instrument du pouvoir étatique, il est lui-même tout le pouvoir car il cesse d’en user comme d’une compétence pour en disposer comme d’une propriété. Sa légitimité ne s’apprécie plus par rapport à une norme préétablie; elle est un absolu dont l’évidence s’inscrit dans ses qualités personnelles» 59 .
Quant à Karl MARX, la domination est vue comme un rapport de force inégalitaire, asymétrique mais non injuste du point de vue du droit bourgeois, car l’extorsion de la plus-value se produit au sein d’un contrat de travail60. Ce sont les différences et asymétries de classes, de la place dans les rapports de production, qui déterminent les inégalités sociales et politiques61.
En d'autres termes, la domination exprime un rapport entre dominants et dominés, même sans coercition effective, l'obéissance des dominés étant généralement consentie dans la mesure où le pouvoir est considéré comme légitime.62
Les 03 types de domination politique établis par MAX WEBER nous éclairent davantage à savoir la domination traditionnelle, charismatique et légale-rationnelle:
La domination traditionnelle: le chef est chef en raison de ses ascendances divines, de ses pouvoirs mystiques, de son lien avec l'au-delà. C’est une domination fondée sur la tradition.
La domination charismatique, c'est le «niveau 2» du pouvoir politique. En raison de son comportement héroïque, de son charisme, de l'admiration irrationnelle qu'un être suscite, celui-ci est considéré comme le chef naturel, spontanément plébiscité... Une survivance moderne de cette domination est le moteur du mythe de l’«homme providentiel»63. Il s’agit d’une domination qui repose sur les qualités exceptionnelles d’un individu.
La domination légale-rationnelle, c’est une domination fondée sur les textes, les instruments juridiques, le droit positif en vigueur dans un Etat.
Nous utilisons de façon interchangeable les concepts pouvoir traditionnel et pouvoir coutumier, chef traditionnel et chef coutumier. Il en va de même du concept d’autorité.
c) L'autorité
Le mot « autorité » vient du latin «auctoritas» qui signifie le fait d’exercer une volonté, de décider, de commander et d’être obéi, en tant que garant reconnu pour la réussite de l’action entreprise. Selon le contexte, il est traduit par autorité, garantie, dignité, prestige, volonté, pouvoir64. Il est formé sur le radical (auct-)issu du verbe «augere», qui signifie «faire pousser», «faire grandir», «augmenter»65.
D'après le Professeur Michel HUMBERT66: « La notion d’auctoritas, essentielle en droit privé et en droit public romains, se rattache, par sa racine, au même groupe que «augere» (augmenter), «augure» (celui qui accroît l’autorité d’un acte par l’examen favorable des oiseaux), «augustus» (celui qui renforce par son charisme [...celui qui est porteur de l'auctoritas]). L’auctoritas exprime à son tour l'idée d'augmenter l'efficacité d'un acte juridique ou d'un droit. [...] De même le Sénat, grâce à son incomparable prestige, a la vertu d'augmenter la portée de tout acte pour lequel il a donné son accord (son auctoritas). [...] Aucune de ces décisions ne sera prise directement par le Sénat (il n'en a pas le pouvoir). Mais tous ces projets, enrichis de l’auctoritas du Sénat, sont assurés du succès. [...]
Aucun acte politiquement significatif n'est mis à exécution par un magistrat sans l'accord (et la délibération) du Sénat. Au point que tout se passe comme si l'inspirateur de la décision était le Sénat, et l'exécutant, le magistrat. Telle est la force de l’auctoritas : sans elle, pas d'action ; devant elle, pas d'inaction ». La notion d'autorité est ainsi définie dans un sens juridique et social.
C'est son caractère nécessaire, voire indispensable à la structure de toute société qui la rend légitime pour le plus grand nombre et qui permet de l'opposer «erga omnes»67. L’« autorité naturelle » peut se dégager d'une personne. Sur le plan professionnel, par exemple, on attribuera à une personne une autorité certaine si elle inspire, à travers sa compétence et sa moralité, la confiance qui permettra d'obtenir le meilleur de chacun et la bonne entente entre les différents individus du groupe.
La philosophe et psychologue Ariane BILHERAN, dans son ouvrage L'autorité, écrit : « D'après Benveniste, « augere » consiste avant tout à poser un acte créateur, fondateur, voire mythique, qui fait apparaître une chose pour la première fois. Bien évidemment, dans la même racine étymologique, l’auteur (auctor) est celui qui fonde une parole et s’en donne le garant. Ce terme était particulièrement employé pour les historiens, l’auteur étant la personne d’où émerge une crédibilité de parole concernant l’héritage et le passé ».
Elle définit alors l'autorité selon trois fonctions : la fonction d'engendrement68, la fonction de conservation69 et la fonction de différenciation70. Elle souligne que l'autorité s'inscrit dans un rapport au temps, à l'héritage, et qu'elle est vouée, dans son exercice, à disparaître : contrairement au pouvoir, à la domination, à la contrainte, l'autorité vise l'autonomie progressive de celui qui en bénéficie.
On peut distinguer plusieurs sources d'autorité parmi lesquelles:
Autorité de pouvoir qui provient des règlements71. Elle concerne la justice, la police, l'État...
Autorité de fonction qui provient des structurations72. Elle concerne l'entreprise, la famille, l'association...
Autorité de compétence qui provient des savoirs, savoir-faire et savoir-être d'une personne ou d'un organisme. Elle peut être reconnue à quiconque se situe dans une démarche personnelle et positive d'amélioration aux points de vue, attitudes, connaissances et compétences, ainsi qu'à quelque organisme ayant fait preuve de prise en compte des besoins de la situation et des personnes. On la qualifie parfois « d'autorité naturelle » ou « charismatique », bien qu'elle tienne des éléments cités.
Par ailleurs, Max WEBER73 affirme que l’autorité est nécessaire au pouvoir. Il montre que toute socialisation passe par une forme de domination, soit une adhésion proche de la soumission volontaire qui dépend des qualités que le dominé prête à celui qui le commande. Pour durer, en effet, l’autorité est dans l’obligation de faire naitre et de renforcer une croyance en sa légitimité. Ainsi, Max WEBER conçoit l’autorité comme la chance de faire triompher, au sein d’une relation sociale, sa propre volonté, même contre la résistance des autres.
Dans cette perspective, la politique est l’ensemble des conduites humaines qui comportent une domination de l’homme par l’homme. De plus, Max WEBER affirme que la domination se rencontre dès lors qu’un individu commande avec succès d’autres, ce qui suppose à la fois la transmission d’un ordre et la rencontre d’une docilité, d’une volonté d’obéissance: «l’action de celui qui obéit se déroule, en substance, comme s’il avait fait du contenu de l’ordre la maxime de sa conduite, et cela simplement de par le rapport formel d’obéissance, sans considérer la valeur ou la non-valeur de l’ordre» 74.
Or, l’obéissance n’existe que parce que le donneur d’ordre bénéficie d’une légitimité. Donc, pour Max WEBER, toute domination, c’est-à-dire toute obéissance, s’explique de façon générale par une croyance au prestige du ou des gouvernants75. In fine, l'autorité est le pouvoir de commander, d'être obéi. Elle implique les notions de légitimité, de commandement et d'obéissance, d'un autre pouvoir qui impose l'autorité. La forme de la légitimité peut varier selon les circonstances76.
Maintenant, nous abordons le concept d’histoire politique (3-).
3. Le concept d'histoire politique
Il convient tout d'abord de préciser la notion d'histoire, puis celle d’histoire politique. Par la suite, nous proposerons d'établir la corrélation entre le concept d'histoire et le concept de politique.
a) Histoire
L’histoire, souvent écrit avec la première lettre majuscule, est à la fois l’étude et l'écriture des faits et des événements passés quelles que soient leur variété et leur complexité.
On désigne aussi couramment sous le terme d’histoire77 le passé lui-même, comme dans les leçons de l'histoire. L'histoire est un récit écrit par lequel des hommes et des femmes78 s'efforcent de faire connaître les temps révolus79. Au cours des siècles, les historiens ont façonné leurs méthodes ainsi que les champs d'intervention, tout en réévaluant leurs sources, leur origine et leur exploitation. La discipline universitaire d'étude et écriture de l'histoire, y compris la critique des méthodes, est l'historiographie. Elle s'appuie sur diverses sciences auxiliaires complétant, selon les travaux menés, la compétence générale de l'historien. Elle reste malgré tout une construction humaine, inévitablement inscrite dans son époque, susceptible d'être utilisée en dehors de son domaine, notamment à des fins d'ordre politique80.
Antoine PROST dans Douze leçons sur l'histoire, affirme que : « L'histoire, c'est ce que font les historiens » et que « c'est en faisant de l'histoire qu'on devient historien » 81 . Partant de là, l'histoire est une discipline qui ne peut se transmettre de façon complète et didactique, elle est un savoir-faire qui s'acquiert de façon progressive, presque artisanalement. La récurrence du vocabulaire artisanal dans les écrits des historiens montre que le métier vient par l'apprentissage, la pratique, l'accumulation et la maîtrise de compétences plus que par un savoir scientifique exhaustif à apprendre. Marc BLOCH se définit ainsi comme « un artisan, vieilli dans le métier » 82 .
François FURET parle d'«atelier», l'historien allemand Werner CONZE évoque une corporation avec ses maîtres, ses compagnons et ses apprentis83. Ces formules paraissent contradictoires chez des historiens qui, dans le même temps, affirment que l'histoire est une science, dotée de règles de fonctionnement. Mais en fait, il s'agit surtout de souligner que les règles de l'histoire s'acquièrent de façon progressive, par la pratique, et qu'aucune règle ne peut être appliquée automatiquement et sans une réflexion aboutie.
Le champ lexical de l'artisanat, très fréquent chez les historiens, exprime toute la complexité de l'histoire. D'ailleurs, la formation de l'historien est en très grande partie fondée sur deux axes : la connaissance de l'histoire en général84 et sur des connaissances pratiques85.
b) Histoire Politique
L’histoire politique est l’une des principales branches de la recherche en histoire. Elle traite des évènements politiques, notamment de l’histoire des États, des idées, des mouvements et des dirigeants à travers l’Histoire. Elle est généralement structurée autour de l’État-nation. Elle est distincte mais liée à d’autres domaines de l’histoire comme l’histoire sociale, l’histoire économique et l’histoire militaire86.
Méprisée en France dans les années 1930 par l’école des Annales, elle connaît une nouvelle vigueur. Dans un sens plus général, on adjoint à ce champ l’histoire militaire, l’histoire administrative et l’histoire diplomatique. On peut dire que l’histoire politique fut longtemps, avec l’histoire religieuse, l’unique champ historique.
De la « Guerre du Péloponnèse de Thucydide » au 5ème siècle av. J.-C., à l’ « Histoire de France » d’Ernest LAVISSE à la fin du 19ème siècle, les œuvres d’historiens traitaient principalement de faits politiques87.
Avant le 20ème siècle, en France, l’histoire était vue comme une succession d’évènements et il ne pouvait y avoir aux yeux des historiens que des évènements politiques. Les avènements et les décès royaux, les victoires et les défaites militaires, les décisions prises au sommet de l’État, l’action des grands hommes88, les interventions de l’Église suffisaient à expliquer l’émergence et l’affirmation de la France. Au Moyen Âge et sous l’Ancien Régime, cette histoire était souvent une histoire officielle. Elle répondait à la commande d’un puissant.
Les rois, mais aussi les aristocrates, s’entouraient d’historiographes chargés de glorifier leur règne et celui de leurs ancêtres. Aussi, les faits présentés étaient politiques. Cet angle de vue rendait d’ailleurs l’apprentissage de l’histoire indispensable pour les princes. La lecture de «La Guerre des Gaules» devait aiguiser leur sens stratégique. «Les Vies de Plutarque» ou «de Suétone» devaient fournir des modèles de conduite et de vertu à l’apprenti-prince.
L’histoire politique avait donc cet avantage d’être conseillère des gouvernants par les leçons de morale et de politique qu’on pouvait en tirer89. L’histoire politique du Cameroun montre que le Cameroun, comme tous les autres pays africains, a tout d’abord vécu entre peuples locaux, puis s’est intégré peu à peu au monde extérieur avec le commerce des esclaves. Ainsi, Reinhardt KOSELLECK affirme «L’histoire est comme un champ d’expériences passées» 90 . Car l’historien envisage la colonisation à ses différentes époques en fonction de la métropole. Il permet de saisir les changements survenus dans les relations existant entre cette dernière et les territoires dépendants, et il montre comment l’isolement des peuples colonisés fut brisé par le jeu d’une histoire sur laquelle ils n’avaient guère de prise.
Il décrit les systèmes administratifs et économiques qui ont assuré la «paix coloniale» et qui ont recherché la rentabilité91 de l’entreprise coloniale92.Par la suite, les contacts fréquents vis-à-vis du monde occidental vont conduire au processus de conquête, d’annexion du Cameroun, par plusieurs puissances étrangères dont la France, l’Angleterre et l’Allemagne entre autres. Il en résulte que le Cameroun est officiellement un pays bilingue, anglais-français, ce qui, répétons-le, constitue un exemple unique sur le continent africain.Un pays bilingue est en bonne logique un pays au sein duquel deux langues sont parlées et comprises, au moins par l’élite de cet Etat, sur toute l’étendue du territoire et où la population93 est capable d’assimiler et de vivre dans le même temps deux cultures différentes94. Nous sommes une mosaïque d’ethnies. Sur le plan social, Karl MARX et LÉNINE pensent qu’une classe politique se compose, en effet, d’hommes subissant des conditions matérielles analogues et ayant conscience de la similitude de leurs situations95. Or, le sentiment de conscience de classe n’est pas ressenti par la population camerounaise. De fait, celle-ci conçoit encore les problèmes qui se posent à elle en termes d’appartenance ethnique.
C’est ainsi que l’ouvrier Bamiléké se sentira plus solidaire du patron Bamiléké que d’un ouvrier Ewondo ayant les mêmes conditions matérielles de vie que lui. En outre, l’intensité du sentiment de solidarité familiale, est un obstacle à l’éclosion d’antagonismes sociaux. A l’image de la famille africaine, la famille camerounaise est foncièrement anti-individualiste. Ses membres se doivent une aide et une protection mutuelles. Le cousin, même éloigné, réduit au chômage, sera secouru par la collectivité familiale, dans le même temps que l’étudiant boursier devra venir en aide à ses parents frères ou ses sœurs dans le besoin96.
Le Cameroun est ainsi à l’image de l’Afrique officielle, laquelle, nous dit un spécialiste, «est souvent une Afrique honteuse, attachée à se renier, à cacher ses problèmes, à les minimiser, à les déformer… Le fait ethnique est traité comme une donnée, «dépassée», morte, une curiosité tout au plus exotique, folklorique, à usage d’amateurs d’antiquités et souvent comme une tare, une menace, une tâche. On se refuse à considérer qu’il évolue, se transforme, acquiert des traits nouveaux et constitue un fait contemporain, au même titre que toute autre donnée sociale et culturelle actuelle» 97 .
La prééminence du facteur ethnique sur le facteur idéologique apparait clairement dans la vie politique camerounaise au stade de l’engagement politique des citoyens98. Compte tenu de cet élément sociologique fondamental qu’est le tribalisme, un homme politique doit, pour atteindre ses fins, avoir de solides attaches locales…Lorsque le régime était pluraliste99, la règle impérative pour tout politicien, consistait à utiliser les structures traditionnelles locales pour servir ses ambitions personnelles100.
c) Corrélation entre histoire et politique
L'histoire est au cœur de la mémoire collective d'un peuple ou d'une nation : elle est un ensemble de références à partir duquel se construit une grande partie de l'identité du groupe social. Ce rôle en fait un enjeu politique considérable : la maîtrise du discours sur le passé par le politique peut être pour lui un moyen de faciliter des desseins de tout ordre.
De nombreuses études portant, notamment, sur la vision de l'histoire transmise par les manuels scolaires, montrent cette instrumentalisation du passé à des fins politiques101. L'appropriation politique du passé peut prendre la forme de culte des « héros » nationaux, modèles censés représenter plus ou moins ce qui est attendu idéalement de chacun.
Si l'instrumentalisation de l'histoire est particulièrement visible dans les régimes totalitaires, qui utilisent fortement l'histoire dans leur logique d'emprise sur le peuple. C’est le cas de l'URSS102 qui pendant la Deuxième Guerre mondiale reprend les symboles historiques et patriotiques russes à son compte, elle est également présente occasionnellement dans des régimes libres qui prennent comme point de référence des « héros » de leur histoire pour accompagner un message politique, de VERCINGÉTORIX sous NAPOLÉON III à Guy MÔQUETA avec Nicolas SARKOZY en France103.
4. PRÉSENTATION DES POUVOIRS POLITIQUES TRADITIONNELS DUALA ET BAMOUN
Nous présenterons tour à tour les pouvoirs politiques traditionnels Duala (1-) et Bamoun (2-).
1. Les chefferies Duala comme cas d’analyse
La connaissance du groupe Duala, à cette époque, a été rendue possible par des écrits de G.A. ROBERTON, de Roland JACKSON, et de Beecroft HUTCHINSON, missionnaires protestants, MERRICK, SAKER, FULLER et bien d’autres. Grâce à eux, on sait que les Duala appartiennent au groupe Bantou dont l’ancêtre était MBEDI.
Deux lignées se forment par la suite après MBEDI. Il y eut la lignée de King BELL, constituée des clans de Bonapriso, Bonabéri, Bonanjo; puis la lignée de King AKWA, avec les clans de Bonabela104 et de Bonaku105. Les Anglais découvrent les Duala avec leur tête deux (02) chefs: King BELL et King AKWA. C’est donc autour de ces deux (02) familles que gravite l’histoire de Douala au 19ème siècle jusqu’à l’implantation de la colonisation.
La vie de cette société traditionnelle est basée sur la famille qui est ici très large et la polygamie joue encore un grand rôle. Ces populations vivent dans l’ensemble, de la pêche et entrent dans le nouveau système du commerce avec l’intérieur du pays106. Avant de signer le contrat avec les Allemands, les rois et leurs suites se réunissent à l’exclusion de tout Européen et préparent un protocole d’accord, qu’ils soumettront à la signature du Consul allemand Emil SCHULZE, préalable pour la signature de tout traité.
Dans le protocole d’accord, les Allemands doivent attester qu’ils ne toucheront pas au monopole commercial des Camerounais, ni à leurs terrains, qu’ils ne bousculeront pas leurs traditions et enfin que les Camerounais n’ont pas besoin de protection, mais qu’ils souhaitent plutôt une annexion pour bénéficier des bienfaits de la civilisation et de la technique allemandes, en contrepartie d’un transfert de souveraineté. Emil SCHULZE signera ce protocole d’accord le 12 juillet 1884107.
Par la suite, nous ferons une présentation du Royaume Bamoun?
2. Le royaume Bamoun comme cas d’analyse
Le Royaume Bamoun, situé dans les montagnes de l’Ouest du Cameroun, a forgé son unité au cours des sept siècles d’existence du royaume depuis la fin du 14ème siècle. Le Roi des Bamoun est de la dynastie de NCHARE YEN, venue de Rifum108.
Les croyances religieuses en vigueur dans cette région sont aujourd’hui l’islam, venu du nord, et le christianisme, venu du sud.109 Avec une superficie de 7700 km² environ et 820.000 habitants110, la région du Bamoun couvre plus de la moitié de l’actuelle région de l’Ouest.
Le royaume est constitué d’un haut plateau111 à l’ouest, surmonté de trois massifs alignés – Mbapit112, Nkogham et Mbam113 – et d’une plaine encaissée au pied de la falaise à l’Est de Foumban; cette plaine longe la rive du Mbam jusqu’au point de confluence avec le Noun près de Bafia.
Le pays est limitrophe du Royaume de La’djo et en est séparé par le Noun114. L’actuel territoire des Bamoun a été unifié par les Tikar en plusieurs étapes. On suppose que vers la fin du 14ème siècle, 200 à 300 personnes ont franchi le fleuve Noun à la suite du Prince NCHARE qui soumit sept principautés avant de s’établir dans un premier temps à Djimom. L’Etat Bamoun y est proclamé et Djimom devient la première capitale du royaume. Le pacte fondamental stipule que: «L’Etat Bamoun est né et NCHARE en est le roi.Il désignera librement son héritier parmi ses fils». Les sept compagnons «Kom», cosignataires, sont les conseillers intronisateurs du roi, chargés de garder la loi fondamentale en l’état et de veiller à son application. Leur fonction est héréditaire et ils sont autonomes. De Djimom, NCHARE soumet une dizaine d’autres ethnies et établit sa nouvelle capitale à Foumban après avoir vaincu les «Ba’Mben» qu’il réinstalle dans un quartier de la ville.
L’étymologie du mot Foumban vient de deux mots de la linguistique Bamoun à savoir: le mot «Fen» qui signifie «ruine» et le terme «Mbe» qui veut dire «peuple qui vient d’être ruiné», transformé par les Allemands, pour une meilleure linguistique, en «Foumban». Le peuple «Mbe», est donc le premier peuple que NCHARE YEN a soumis.
De plus, le terme «Bamoun» veut dire «les gens qui marmonnent les mots» ou «Pa Mon» à l’origine, donné par les autochtones de Foumban, appelés «Njimon»115. En 1902, les Bamoun, voulurent prendre les armes contre les premiers visiteurs allemands; NJOYA, conscient de la faiblesse des siens face aux Européens, les obligea à les accueillir pacifiquement et évita un bain de sang.
Le souverain conçut une politique dans laquelle il se donna le rôle d’intermédiaire indispensable entre les autorités coloniales et son peuple: «Si les tirailleurs, arrivent au marché et qu’ils prennent quelque chose, ou qu’ils frappent, ne vous (Bamoun) fâchez pas – leur dit-il, laissez-moi l’affaire des Blancs» 116 . Il put, par la suite, tirer profit de ce premier contact chaleureux: c’est ainsi qu’il récupéra, lors du conflit Germano-Bansoh de 1906, le crâne de son père, le Roi NSANGOU.
A la suite de cette clarification conceptuelle, nous passons en revue la délimitation du sujet ou le bornage de l’étude sur l’objet de recherche.
5. DÉLIMITATION DU SUJET OU BORNAGE DE L’ÉTUDE
Il est question dans la délimitation de tracer le périmètre du sujet, de définir ses contours. Plus précisément, il s’agit d’inscrire le sujet dans son triangle spatio- temporel et scientifique. Délimiter le champ de recherche « c’est le fait de calibrer le travail afin de ne pas courir le risque d’être critique pour négligence » 117. Ainsi, il nous revient de délimiter notre travail dans le temps et dans l’espace (1-), et de l’autre, de le circonscrire dans le domaine du vaste champ de la science politique (2-).
1. Cadre spatio-temporel de l’étude
Terminus à quo
Dans la délimitation temporelle, notre étude se situe entre 1884 et 1916. En effet, l'année 1884 représente le début du protectorat allemand sur le Cameroun. Quant à l’année 1916, il représente les prémices du déclin de l’Allemagne et la perte progressive de ses colonies.
Le 24 avril 1884, soutenu par l'opinion publique, BISMARCK proclame la souveraineté allemande sur la baie d'Angra Pequena, sur la côte de l'actuelle Namibie. Les ethnies locales, Hereros et Hottentots, seront soumises par la force. D'avril à novembre, des explorateurs mandatés par Berlin proclament la souveraineté de l'Allemagne sur le Sud-Ouest africain, le Togo, le Cameroun et l'Afrique orientale. Le 5, 11 et 12 juillet 1884 représentent l'établissement du protectorat allemand au Togo et sur la cote du Cameroun. L'explorateur NACHTIGAL fait signer aux chefs locaux des traités de protectorat. Enfin, le 15 novembre 1884 a eu lieu la Conférence de Berlin qui réunit 14 pays et s’acheva le 23 février 1885. Et le mois de février 1916 marque la date de départ de l’Allemagne du Cameroun.
Cette conférence fut essentiellement consacrée aux questions africaines118. Elle réglementa, entre autres, la colonisation sur le continent entre les différentes puissances européennes, ainsi que la rivalité franco-belge au Congo.
Parmi les mesures prises, nous avons la Conférence de Berlin:
1. Prenait acte de l’existence de l’État indépendant du Congo, avec comme souverain le roi des Belges, Léopold II;
2. Posait les principes qui devraient être respectés à l’avenir pour la prise de possession de nouveaux territoires: tout État assurant la prise de possession devrait adresser une notification aux autres Puissances et effectuer une occupation réelle;
3. Établissait la liberté du commerce dans toute la zone que l’on appelait le «Bassin conventionnel du Congo» et qui comprenait le littoral atlantique depuis l’embouchure de la Lobé jusqu’à la rive sud de l’Ogooué, et, du côté de l’Océan Indien, toute la zone comprise entre le Zambèze au sud et la frontière méridionale de l’Éthiopie, au nord 119 .
Le Chancelier BISMARCK réussira, donc, à faire reconnaitre et ratifier par la Conférence les acquisitions réalisées par Gustave NACHTIGAL et de favoriser l’entrée de l’Allemagne en Afrique avec l’assentiment des autres puissances. Par ailleurs, l'année 1916 représente les prémices du déclin de l'Allemagne et de la perte progressive de ses colonies.
Tout d’abord, le Cameroun devient un front secondaire du conflit d’août 1914, alors que la guerre de mouvement en Europe vient juste de commencer. Les Camerounais y participent aux côtés des Allemands et affrontent les puissances coloniales française, britannique et belge. Si peu de combats ont lieu à Douala proprement dit, la principale ville portuaire et ancienne capitale du Kamerun allemand120, sert tout au long du conflit de base arrière aux Alliés qui y établissent leur commandement et préparent leurs offensives sur les différents fronts. Puis, le 1er janvier 1916 au Cameroun, les troupes alliées entrent à Yaoundé, évacuée par les Allemands. Le 15 février 1916, les troupes allemandes du Kamerun se réfugient en territoire espagnol, au Rio Muni. A cette nouvelle, la ville de Mora, qui résiste au nord, se rend le 18 février 1916. Le Cameroun est occupé par les Alliés après une longue résistance de plus de 16 mois.
Enfin, le 04 mars 1916, les Français et les Britanniques se partagent la Colonie allemande du Kamerun. Cette situation se matérialisera avec la fin de la Première Guerre Mondiale, la défaite de l'Allemagne en 1918 et la signature du Traité de Versailles en 1919.
Cet espace temporel nous servira de baromètre pour l'analyse de l'histoire politique du Cameroun depuis 1884, sous le prisme des rapports entre l’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques Duala et Bamoun.
Terminus ad quem
En ce qui concerne les limites spatiales, il faut savoir qu'entre 1884 et 1916, le Cameroun était sous domination allemande. Après avoir échoué dans leurs tentatives de demande de protectorat anglais, les chefs Duala se tournent vers les Allemands qui en la personne de Gustave NACHTIGAL, va négocier la mise sous protectorat allemande du Cameroun. Cela va aboutir à la signature du traité Germano-Duala le 12 juillet 1884 et qui marqua la naissance internationale du Cameroun moderne. En 1901, l'Espagne accorda par ailleurs à l'Empire allemand un droit de préemption sur l'ile de Fernando-Po, située dans la baie de Douala. Le Cameroun, dont le territoire est recouvert par d’importants forts, produira essentiellement du caoutchouc, de l'huile, des noix de palme et du cacao auxquels viendra s'ajouter l'ivoire, objet d'un vaste trafic en Afrique centrale.
L'Allemagne y maintint par ailleurs ses plus importants effectifs militaires dans cette partie de son empire, en raison notamment de sa position stratégique vis-à-vis des débouchés commerciaux des régions centre-africaines. Il commandait en effet l'accès aux possessions françaises, du Moyen-Congo, de l'Oubangui-Chari et du Tchad et enfin, du Congo Belge.
2. Cadre matériel de l’étude
C’est l’opération qui permet de cerner le champ matériel d’investigation et qui peut s’entendre comme « l’espace conceptuel et notionnel du sujet »121. C’est l’ensemble des matières qui intéressent le sujet. A cet effet, il y a lieu de dire que cette présente étude a un caractère transversal, car elle convoque les champs de l’anthropologie politique et de la sociologie politique. Selon Madeleine GRAWITZ, la sociologie politique serait le «produit d’une hybridation lorsque la sociologie et la science politique seront à égalité» 122.
La colonisation a partout installé les conditions d’un affaiblissement de peuples conquis ou rebelles et de la disparition de leur culture. Les colons sont confrontés à la difficulté d’imposer leur présence sur les terres nouvelles dont les richesses sont convoitées.
Ainsi, leurs bonnes intentions, dites civilisatrices, échouent et les colons sont rapidement amenés à affronter les peuples autochtones. Lorsqu’une escalade dans la violence et la haine se produit, l’exploitation des autochtones, leur déportation, leur massacre, peuvent parfois préfigurer ou aboutir à des exterminations intentionnelles. En Namibie, connue autrefois sous le nom de Sud-Ouest Africain, eut lieu ce qu’on nomme communément le massacre des Hereros. Les Hereros sont déportés par la puissance colonisatrice allemande qui y établit les premiers camps de concentration.
Ainsi, Lothar VON TROTHA écrit que «le peuple Herero doit quitter le pays sinon, je le délogerai avec le «groot Rohr» (grand canon). D’une population initiale de 90.000 Hereros, le recensement de 1911 en décompte 15.000. Les Namas, peuple allié aux Hereros contre la puissance allemande, passent de 20.000 à 10.000. Au-delà de l’esclavage, la pacification, la répression des révoltés et le travail forcé ont fait régresser les populations sur le plan démographique».[123]
Dans ce contexte, les pouvoirs politiques traditionnels participent à la pérennisation des traditions et coutumes face aux bouleversements de la colonisation et de l’Etat moderne africain. Ils ont un impact considérable dans le jeu politique local et national.
6. REVUE CRITIQUE DE LA LITTÉRATURE
Encore appelée «histoire du problème», «fondement théorique de la recherche», «analyse de source», ou «recension critique des études et travaux antérieurs», la revue de littérature est une phase au cours de laquelle l’on fait le point et l’état actuel des connaissances sur le sujet choisi par le chercheur124.
Il s’agit ici de recenser les travaux publiés non pas dans l’optique d’une «gloutonnerie livresque»125, mais dans une perspective de disposer des informations sur les études théoriques et méthodologiques qui se situent dans le champ de la problématique construite par le chercheur.
Comme l’affirmait Pierre N’DA, la revue de littérature a donc l’avantage de permettre au chercheur d’apprécier toutes les publications, de mieux percevoir son propre sujet et d’en avoir une vision d ‘ensemble plus nette. Le but ici est de découvrir les aspects qui ont déjà été abordés et les aspects négligés ou tout simplement ignorés126.
Aussi, le rôle est de dégager d’une part, les thèmes majeurs identifiés chez les auteurs et d’autre part, de relier ces thèmes aux différentes dimensions de la question de recherche et à son contenu, global127. En d’autres termes, la revue de littérature renvoie une sorte d’évaluation, qui permet de faire le point sur ce qui a été dit, ou écrit sur le sujet.
Si les relations entre l'administration allemande et les pouvoirs politiques Duala et Bamoun durant la période de 1884 à 1916 ont aiguisé notre curiosité scientifique, c'est avant tout parce qu'elles soulèvent depuis des années un débat vif entre les acteurs de la société civile128 et qui se révèle très complexe. Dans pareil contexte où la passion semble prendre le pas sur la raison, toute tentative de trouver une réponse scientifique à cette question parait biaisée dès le départ.
Mais au-delà de la passion, des chercheurs d'obédiences disciplinaires diverses, se sont penchés aussi sur cette question en essayant de dépasser les passions qui peuvent conduire à des conclusions hâtives et triviales afin d’aboutir à une explication scientifique.
Sont-ils parvenus véritablement à s'émanciper de ces idées préconçues ou des caractéristiques de leurs personnalités propres ? Il est difficile de répondre par l'affirmative au regard de ces études réalisées par des chercheurs qui n'ont pas posé le problème de la même manière et qui ne sont pas toujours parvenus à des résultats identiques. En revanche, ce qu'il est possible d'affirmer ici, c'est qu'il n'y a pas d'unanimité entre ces derniers sur les répercussions de la colonisation allemande sur les pouvoirs politiques Duala et Bamoun de 1884 à 1916.
Pour l'essentiel, deux thèses semblent s'opposer sur cette question : si certains auteurs pensent que l'administration allemande a eu des répercussions positives sur les sociétés traditionnelles Duala et Bamoun en particulier, et sur la société camerounaise en général ; d'autres, par contre, pensent que l'on doit situer la colonisation allemande au même titre que les autres conquêtes des autres puissances européennes telles que la France, l'Angleterre, etc.
1. La thèse des répercussions positives de la colonisation allemande
Pour les tenants de la première thèse, l'administration allemande s'est illustrée par des œuvres significatives et majeures dont les traces sont encore visibles de nos jours : Birgit PAPE-THOMA129 évoque tout d'abord le fait que la carte du Cameroun130 est bien de manière générale issue de tracés allemands. Par ailleurs, selon Patrice NGANANG, au Cameroun tout comme au Togo, l'Allemagne a pour réputation, «de soutenir les gens de bonne volonté qui veulent que le Cameroun devienne vraiment ce qu'il peut être» 131 .
Le travail de la Fondation FRIEDRICH EBERT démontre à suffisance cet état d'esprit, surtout durant les années de braise pendant la décennie 1990. C'est pourquoi certains Togolais ainsi que des Camerounais «se vantent» d'avoir hérité des soi-disant vertus allemandes comme la discipline ou l'assurance.
Ce qui est à relativiser pour Patrice NGANANG qui parle plutôt d'une volonté de remettre la France à la place relative qui a été sienne dans l'histoire camerounaise que d'une glorification de la colonisation allemande132. Des espaces en Allemagne ont été également baptisés au nom de ses anciennes colonies au début du XXème siècle pour commémorer l’apogée de l’Empire allemand alors composé du sud-ouest africain133, de l’Afrique orientale allemande134 du Togo et du Cameroun. Nous notons par exemple l’existence de la «rue du Kamerun»135 dans le quartier Wedding ou encore la rue du Togo, la rue du Windhoek, ou encore la rue du Zanzibar136.
La langue allemande est toujours enseignée dans les lycées et collèges camerounais, et les centres culturels GOETHE sont présents sur tout le territoire. Les étudiants sont attirés par l’Allemagne par son expertise dans les «sciences dures»: l’électromécanique, les mathématiques, la technologie. Le savoir-faire allemand est considéré comme plus fiable, plus robuste137. Alain FINKIELKRAUT138 qui aborde dans le même sens, écrit ce qui suit : «On enseigne aujourd'hui dans les écoles l'histoire coloniale comme une histoire uniquement négative. On n'enseigne plus que le projet colonial voulait aussi éduquer, apporter la civilisation aux sauvages» 139 ...
En d’autres termes, la colonisation a permis l’émergence d’une élite et la scolarisation des peuples. En plus, au niveau sanitaire, on note un recul marquant du paludisme, de la malaria et de nombreuses maladies tropicales. La médecine et l’accès aux soins ne sont plus considérés comme un luxe, mais, certains auteurs avancent que les initiatives de santé publique avaient pour but d’enrayer la décroissance démographique et de conserver de ce fait un réservoir de main d’œuvre.
Ainsi, il est peut-être important de rappeler, par exemple, que dans l'affaire BAKASSI qui a opposé le Cameroun et le Nigéria à la CIJ140, l'État camerounais a dépoussiéré, entre autres, un vieux traité de 1913 datant de l'époque allemande, pour faire valoir ce territoire riche en pétrole comme faisant partie du territoire camerounais141. Sur place au Cameroun, la propagande allemande, dans la partie aussi bien française que britannique, fut placée sous la haute direction du «Deutscher Kolonial Dienst»142 dont le siège était à Nuremberg.
Il existait au Cameroun en 1936 un «Landesgruppe», c’est-à-dire le Groupe des représentants du Land, qui comprenait deux directions: une direction politique s’occupant de la propagande, des mouvements et de la situation individuelle des Allemands résidents143. Selon le bulletin de renseignements N°1 du Commandement des forces de police du Cameroun daté du 03 septembre 1936 à Yaoundé, la direction politique aurait été assurée par le chef de l’entreprise «Dekage» à Douala144. Quant à la direction de la propagande, elle aurait été confiée à un Allemand résidant au Cameroun dont le nom était connu des autorités françaises, il s’agit de Théo BLEICH, propriétaire de la plantation de bananes de Likomba, une localité située entre Buéa et Tiko, la «Kamerun Bannen Gesellschaft»145. BLEICH était assisté de deux adjoints également directeurs de plantations et résidant au Cameroun britannique.
La liaison entre l’ancienne métropole et le Cameroun s’effectuait par des bateaux allemands qui avaient tous à leur bord un « politischer Letter», autrement dit, un guide politique. Il existait également au Cameroun une association connue sous le nom de «Kamerun Eingeborenen Deutsch Gesinnten Verein»146. Selon le bulletin de renseignements de septembre 1936, cette association ne semblait pas jouir d’un grand crédit auprès des indigènes, mais le Gouverneur BONNECARRERE n’était pas de cet avis, lui qui, dans un rapport au Ministre des Colonies, s’inquiétait dès 1933 de l’ampleur prise par les activités de la «Native Church» et signalait la découverte d’un foyer d’agitation dans le sud de la circonscription de Nkongsamba, en région Pongo147.
Or, l’association germanophile avait de nombreux amis dans la mission de la «Native Baptist Church» dont les adeptes avaient pour profession d’assurer, moyennant un salaire assez conséquent, le chargement des bateaux bananiers allemands148. Avant de quitter le Cameroun à cause de la Première Guerre Mondiale, les pasteurs allemands avaient confié la direction de leur église à leur homologue camerounais Lotin SAME149. Lotin SAME s’entoura d’un état-major de choc comprenant des pasteurs, des chefs supérieurs, des employés de maisons de commerce et des notables influents tels que NDOUE et EBELLE, deux Duala qui avaient été condamnés à 18 mois de prison ferme et à deux ans d’interdiction de séjour pour avoir notamment prophétisé le retour des Allemands au Cameroun150. Les évènements évoluant rapidement, Lotin SAME et ses partisans s’organisèrent davantage au cours de plusieurs réunions clandestines; les participants à ces réunions recevaient de la part des encadreurs allemands des instructions et indications sur la manière dont la propagande anti-française allait être conduite; l’assistance était aussi tenue au courant de l’évolution de la situation de crise en Europe; des lettres en provenance d’Allemagne étaient lues à leur intention; en retour, des membres du groupe adressaient des correspondances à HITLER151 …
Le mouvement de Lotin SAME connut une intense activité pendant la période de grande crise en Europe et que l’administration coloniale française finit par croiser les bras, non sans avoir auparavant essayé de l’étouffer par diverses mesures: affectation loin de Douala de fonctionnaires sympathisants du mouvement, instructions données aux chefs des circonscriptions de Nkongsamba et de Yabassi voisines d’interdire l’accès de leur territoire à Lotin SAME et son principal lieutenant Jonnie EKWE, qui seuls pouvaient accorder le sacrement à leurs adeptes, peines de prison prononcées contre certains partisans les plus en vue comme EBOLO BILE, assesseur à la Chambre d’homologation depuis de nombreuses années et qui, à ce titre, jouissait d’une influence indéniable dans les milieux Duala152 ; celui-ci fut accusé de diffamation à l’égard d’un notable Duala de religion protestante et de porter atteinte à l’ordre public.
Simultanément, l’administration travailla à monter une partie des Duala contre Lotin SAME; c’est ainsi qu’une délégation «importante» de notables conduits par leurs chefs alla voir le gouverneur pour réclamer la fermeture d’un des quatre temples de la «Native Church» à Douala dans l’intérêt de la «tranquillité», car ce lieu était devenu un «foyer d’agitation politique»153. Autre groupe germanophile, le K.F.D.G.V.154 était aussi connu sous le nom de Société des amis de l’instruction. Tous ses adhérents étaient tenus de prêter serment de fidélité à l’étranger155.
La répression de l’administration française s’abattit sur le mouvement; deux procès furent intentés contre certains de ses membres156, l’un en 1934 et l’autre en 1941; à l’issue du procès de 1941, le chef et principal animateur du groupe, dont le nom nous est inconnu, fut condamné à mort et ses principaux lieutenants, AKWAN et BASSI, condamnés chacun à dix ans de travaux forcés157.
La gravité des peines infligées s’explique ici par l’évolution de la situation politique au Cameroun depuis l’entrée en guerre. Les mouvements organisés n’étaient pas seuls à militer en faveur du retour des Allemands. Les Camerounais formés à l’école allemande, qui avaient joui d’un certain nombre de privilèges et les avaient perdus avec l’arrivée des Français, partageaient le même sentiment. La troisième catégorie de germanophiles comprenait ainsi des chefs indigènes, des anciens combattants, des anciens gardiens de plantations et des anciens domestiques, tous de la périodede colonisation allemande.
Il faut y ajouter ceux des Camerounais qui haïssaient la France simplement à cause des mauvais traitements que ses représentants leur faisaient subir158. Il n’était pas rare de voir certains éléments de cette catégorie, à l’instar de Jean NYAP, chef du groupement de Ndogbessol159 écrire directement au Chancelier HITLER160.
On peut donc reconnaitre le fort impact dont est crédité encore aujourd’hui le système de protectorat allemand sur les populations camerounaises. Même les colons français reconnurent, l’efficacité du système colonial allemand, non sans nuances: «Nous ne pouvons tenir pour nuls les résultats de l’activité allemande au Cameroun… Dans l’ordre pratique, nous avons bénéficié de tout ce qui a été fait pour l’ouverture du pays, l’apprivoisement de l’indigène, la formation des auxiliaires» 161 .
Cet aspect de la colonisation allemande ne sera cependant pas mis à l’actif des dirigeants du Protectorat, ce qui explique l’oubli dans lequel on tint quelques hauts fonctionnaires allemands, pourtant très en avance dans leur politique indigène: «C’est moins aux grands chefs de la politique allemande, précise l’auteur,, que doit aller la gratitude de la civilisation qu’au personnel d’exécution, chefs de poste, sous-officiers, agents de culture 162 et piqueurs de route 163 . Mis en présence d’indigènes qu’ils avaient à éduquer, ces sous-ordres ont pu avoir quelquefois la main rude, mais ils ont fait la bonne besogne. Ils ont fait preuve de ténacité et de bon sens. Le pays a été bien préparé et la pénétration a été poussée aussi loin qu’il se pouvait. Mais cette besogne indispensable est subalterne» 164 .
2. La thèse de la négativité de la colonisation allemande
Pour les tenants de la seconde thèse, la colonisation allemande possède elle aussi des côtés obscurs, des actes manqués, des travers qui la positionnent au même titre que les autres colonisations européennes : Birgit PAPE-THOMA affirme que les Allemands ne furent pas meilleurs colons que les autres Européens. Car le travail forcé et les punitions cruelles faisaient partie de l'ordre du jour165.
Kagni ALEM poursuit dans le même sens en évoquant la chicotte allemande au Togo et les fameux cent coups de fouet, sur les fesses, dont le centième était dédié au Kaiser, «Ein fur Kaiser»166. Pierrette HERZBERGER-FOFANA, Professeure à l'Université d'Eurlangen-Nurnberg, explique que par nature: «La colonisation vise à exploiter un pays pour en tirer le maximum de ressources. Pour cette dernière, vu que la colonisation allemande a été très dure en Tanzanie et en Namibie, cela amène à penser qu'elle a été moindre au Cameroun malgré le fait qu'il y ait moins d'archives sur le Cameroun» 167 . Les sociétés en situation coloniale sont fortement soumises aux contraintes de l’ambigüité et de l’ambivalence. Il intervient un véritable effet de grossissement, et le décalage entre les apparences de la réalité sociale et cette réalité elle-même en est d’autant accentuée… Les sociétés ne sont jamais ce qu’elles paraissent être ou ce qu’elles prétendent être. Elles doivent, en conséquence, être considérées à deux (02) niveaux au moins: l’un, superficiel, présente les structures «officielles» si l’on peut dire; l’autre profond, permet d’accéder aux rapports réels les plus fondamentaux et aux pratiques révélatrices de la dynamique du système social168.
La situation coloniale est définie ici comme la domination imposée par une minorité étrangère, «racialement» et culturellement différente, au nom d’une supériorité raciale169 et culturelle dogmatiquement affirmée, à une majorité autochtone matériellement inférieure; la mise en rapport de civilisations hétérogènes: une civilisation à machinisme, à économie puissante, à rythme rapide et d’origine chrétienne s’imposant à des civilisations sans techniques complexes, à économie retardée, à rythme lent et radicalement «non chrétiennes»; le caractère antagoniste des relations intervenant entre les deux(02) sociétés qui s’explique par le rôle d’instrument auquel est condamnée la société dominée; la nécessité pour maintenir la domination, de recourir non seulement à la «force» mais encore à un ensemble de pseudo-justifications et de comportements stéréotypés, etc.170. Par ailleurs, le développement du chemin de fer en Afrique est suspecté d’être à l’origine de la diffusion primaire du VIH 1171 en Afrique Équatoriale Française172 dans les années 1910-1940.
De plus, l’attention accordée à la société coloniale en tant que «minorité dominante» est fructueuse. Henri LAURENTIE a de son côté, dans une étude d’allure essentiellement politique, définit la «colonie» comme: «Un pays où une minorité européenne s’est superposée à une majorité indigène de civilisation et de comportements différents; cette minorité européenne agit sur les peuples autochtones avec une vigueur disproportionnée au nombre; elle est, si l’on veut, extrêmement contagieuse et, de sa nature, déformante» 173 .
Cette «minorité» active assied sa domination sur une supériorité matérielle incontestable, sur un état de droit établi à son avantage, sur un système de justifications à fondement plus ou moins racial, et pour certains auteurs, tel René MAUNIER, le fait colonial est d’abord un «contact» de races. Elle est d’autant plus réactive qu’elle est mieux enracinée et rebelle à la fusion, qu’elle se sent menacée par la poussée démographique des colonisés: ainsi, en Afrique du Sud où la population blanche voit «dans sa situation un problème de minorité, alors que les Noirs voient dans la leur un problème colonial et de tutelle» 174 .
L'historien Andreas ECKERT, Professeur à la «Humboldt University» à Berlin commente d'ailleurs ceci: «Le plus grand symbole de la brutalité et de la domination des colons allemands est bien Rudolf DOUALA MANGA BELL» 175 . Ce chef supérieur du clan des BELL s'est opposé en 1910 au projet d'urbanisation dit «Gross Duala» qui prévoyait l'expropriation des populations locales. Il fut pendu le 08 août 1914, devenant un héros de la résistance face au colon176. «Les Églises n’ont pas levé le petit doigt pour aider Rudolf Manga Bell», critique Bienvenue, pasteur à Bafia, dans l’Ouest du Cameroun. «L’expropriation des terres allait de soi pour les colons comme pour les missionnaires».
Églises et Etat, même combat? L’Allemagne ayant à la fois une tradition catholique et une tradition protestante, les Églises se sont partagé le Cameroun en zones d’évangélisation. «Les missionnaires catholiques allemands se sont installés près d’Edéa et de Douala, et les protestants sont allés plus dans les terres, dans l’Ouest du pays», commente Bienvenue. Aujourd’hui encore, l’Église Évangélique du Cameroun177 entretient des relations avec celle de Westphalie, en Allemagne. Au pays Bamiléké aussi, certains se souviennent de la politique de répression des Allemands, même si c’est maintenant de l’histoire ancienne178.
Germain METANGMO, frère du chef, de NTSINGBEU, se rappelle que les chefs Bamiléké n’étaient pas appréciés par les colons, probablement perçus comme des concurrents en matière d’autorité: «En tant que chef, mon grand-père s’est opposé du pouvoir des Allemands, il a été pendu sur la place publique. On raconte qu’avant son exécution, il s’est blessé intentionnellement à la tête avec une pierre, pour qu’on reconnaisse son crâne et qu’on l’enterre plus tard selon le culte Bamiléké»[179].
Et c'est peut-être Albert MEMMI qui fait preuve de l'analyse la plus objective : «Il n'y a pas de quoi se vanter : si les colonisateurs construisaient des routes et des écoles, c'est qu'ils en avaient besoin, non pour servir les colonisés» 180. Et le jugement des caractéristiques morales par l’idéologie colonialiste vient étayer cette opinion. Le Nègre, l’homme d’en face dans la situation coloniale, devient alors, pour une raison inavouée mais claire, le dépotoir de tous les défauts181. «La caractérisation et le rôle du colonisé occupent une place de choix dans l’idéologie colonisatrice; caractérisation infidèle au réel, incohérente en elle-même, mais nécessaire et cohérente à l’intérieur de cette idéologie» 182, ajoute Albert MEMMI.
Le jugement est péremptoire, souvent par ce qu’Albert MEMMI appelle «la noyade dans le collectif péremptoire», le pluriel «ils»183. La paresse des peuples colonisés est dite légendaire et toujours connue et admise a priori184. On peut, à titre d’exemple, lire ceci: «Les Bakweri, une bande de paresseux », «la paresse abominable de toutes les tribus qui habitent le sud-est du Cameroun», «des tire-au-flanc duala, paresseux et maladroits» 185.
La goinfrerie n’est pas moins légendaire, et est à chaque fois exagérée186: «Un éléphant a été tué: «Vous auriez un tableau particulièrement caractéristique du Cameroun si vous aviez peint les Noirs qui se disputaient et se battaient au moment du dépeçage pour les lambeaux de chair saignante. Les plus heureux avaient eu un morceau et les ramenaient sur la tête, de sorte que le sang couvrait tout leur corps. Même si le cadavre était déjà en voie de décomposition, les indigènes arrachent de la viande pour la – comme ce sont des êtres humains, il faudra bien dire – manger. Après ce repas ils restent couchés comme le python et ne sortent peut-être que quelques jours plus tard de leur sommeil digestif» 187 .
Pour imposer sa culture, le colonisateur passa par le biais de deux processus que sont la scolarisation et l’évangélisation. Une fois de plus, les chefs furent appelés à jouer un rôle déterminant. On décelait chez maints chefs, surtout chez ceux de la région côtière, un désir de mettre leur jeunesse et très souvent leur progéniture à l’école du colonisateur, ceci était manifeste chez les chefs Duala188.
Exception faite des écoles gouvernementales, l’administration laissa aux missionnaires, le soin de procéder à l’endoctrinement et à la socialisation des jeunes colonisés. La création d’écoles s’avérait une nécessité dans la mesure où le régime colonial avait besoin d’un personnel subalterne, bon marché et passablement «éduqué»189.
Pour les missionnaires, la conversion d’un chef représentait une «victoire» sur ce qu’ils appelaient paganisme; elle avait des chances d’en provoquer d’autres dans la population190.
Partant de là, Allen et Barbara ISAACMAN ont certainement raison lorsqu’ils affirment que la collaboration tout comme la résistance, était situationnelle191. Par ailleurs, pour les Français, la colonisation allemande leur apparaissait, en définitive, comme ayant été «hésitante» et trop «théorique». Selon CHAVELAS, ce qui a été fait pour l’«indigène» n’a été «qu’œuvre accessoire et a été imposé par le souci de donner satisfaction à l’opinion allemande et à certains éléments de l’opinion locale» 192 . Et de conclure que «le véritable but sans cesse poursuivi a été le développement des grandes plantations». Pour les premiers administrateurs français, ainsi que, par tradition, pour ceux qui leur succéderont, «il n’a pas fallu moins que la guerre pour mettre fin à cette politique» 193 .
Cette partie consacrée aux répercussions négatives de l’administration coloniale allemande est celle que nous partageons. D’ailleurs, c’est donc dans ce sens que s’oriente ce travail, c’est-à-dire de démontrer comment le pouvoir colonial allemand a voulu s'imposer dans la colonie en usant soit de la brutalité, soit de l'utilisation des chefs traditionnels dans son processus de conquête. Ainsi présentée, l'administration coloniale allemande est perçue comme vertueuse pour son œuvre bienfaisante, mais aussi comme une machine, une vaste entreprise de domination sur les différentes structures politiques, économiques et socioculturelles existant dans la colonie.
C’est pourquoi Évariste FOPOUSSI FOTSO considère la chefferie traditionnelle comme l’un des rares pôles de résistance des valeurs civilisationnelles africaines aux prétentions hégémoniques de l’Occident telles que le colonisateur et ses suppôts contemporains essaient de nous imposer. Cela provient de la solidité de ses fondements philosophiques et institutionnels, de sa proximité avec le peuple, de son fonctionnement globalement en conformité avec les principes élémentaires de la démocratie. Il faut dans la même veine souligner l’importance donnée à la réflexion de Georges BALANDIER194, qui témoigne de la richesse autrefois soupçonnée et maintenant reconnue des chefferies traditionnelles.
Le système politique traditionnel apparait ainsi comme affecté par les tensions et les conflits, comme toujours agissant malgré les vicissitudes subies. Il oriente, pour une part et partout, la vie politique moderne. Ses incidences peuvent aussi être saisies à un autre niveau. Les responsables des nouvelles nations africaines n’ont pu imposer, par contrainte et d’un coup, une philosophie et des organisations politiques totalement étrangères; en quelque sorte importées.
Ils ont dû effectuer un travail d’adaptation et de «traduction» en recourant à l’équipement politique traditionnel. L’Etat postcolonial a reconduit sans solution de continuité le régime d’émasculation de l’autorité traditionnelle mis en place par la colonisation. La chefferie elle-même en tant que collectivité humaine est tantôt diluée dans les collectivités locales, tantôt assimilée aux circonscriptions administratives existantes. Il en résulte donc un flou vis-à-vis de son statut juridique et de sa position sur l’échiquier politique national.
Il y a également l’ouvrage d’Évariste FOPOUSSI FOTSO,195 qui va dans le même sens puisque juridiquement, les chefferies sont aujourd’hui une courroie de transmission entre les autorités administratives et leurs communautés. Mais il affirme aussi que nos chefferies sont affaiblies et dépassées par les évolutions de la société, qu’elles sont stériles face à «la nécessité de bâtir un Etat moderne, démocratique et uni, et qu’elles n’offrent plus à notre jeunesse de vrais rêves d’avenir» 196 .
Claude-Hélène PERROT et François-Xavier FAUVELLE-AYMAR197 qui posent la problématique des rapports entre deux modèles de régulation politique et sociale, à savoir le modèle endogène c’est-à-dire traditionnel et le modèle exogène, c’est-à-dire moderne imposé par les autorités coloniales et postcoloniales. Ils ont également mis en exergue les ambigüités de cette problématique, où l’on perçoit certes une confrontation, mais avec des stratégies d’adaptation, dans une dialectique de rapports qui oscillent de la rivalité à la soumission en passant par l’instrumentalisation. Celle-ci n’est pas toujours univoque, les rois et chefs africains ayant su, à l’occasion, faire montre de capacités de manipulation.
Plusieurs contributions de cet ouvrage collectif ont porté l’éclairage sur les années 1989-1991, marquées par le «renouveau démocratique» qui a permis le développement du multipartisme et du clientélisme qui offrent une marge de manœuvre aux chefs et rois intéressés à jouer un rôle politique.
Le contexte démocratique, dans de nombreux cas, conduit à la réhabilitation des structures traditionnelles qui, paradoxalement, s’impliquent dans des projets de développement et de modernisation. Le parti politique, obéit à cette exigence, au point de n’exprimer parfois que des rapports de force entre groupes ethniques – ainsi que le manifeste d’une façon presque caricaturale le Congo-Léopoldville. Le personnage du leader se modèle souvent sur les types d’autorité que recelait l’ordre ancien: celui du souverain qui ordonne en accord avec les dieux et les ancêtres, celui du prophète ou du messie qui annonce et provoque les temps nouveaux.
Enfin, lorsqu’il s’agit de vulgariser l’idéologie, de diffuser les symboles à signification politique, d’organiser le rituel de la «religion politique», la référence à certains modèles traditionnels opère également. Et cela, même dans les pays où les gouvernements ont provoqué l’élimination ou l’abaissement des chefs de vieux style.
A cela, il faut y ajouter les fonctionnaires198 qui animent les associations de ressortissants résidant en ville. Cette troisième force se hisse parfois au premier plan, réussissant à éclipser les personnages royaux, notamment en décidant de l’organisation des fêtes traditionnelles: ainsi, en Zambie, l’association culturelle «Kazanga», usurpe la vedette au moment du festival annuel des «Nkoya» et tend à reléguer les chefs, dont pourtant les ancêtres sont mis en vedette, au rang de personnages folkloriques199.
C’est suite à tous ces manquements observés dans l’ensemble que s’inscrit l’originalité de notre modeste travail qui consiste, à partir de l’anthropologie et de la sociologie politique, de mesurer d’une part, l’influence de l’administration coloniale allemande sur les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun. Et d’autre part, de parler de l’adaptation du pouvoir colonial allemand aux gouvernances traditionnelles Duala et Bamoun. La sociologie est d’une aide précieuse pour mieux comprendre et expliquer l’impact de la dimension sociale sur les représentations200 et les comportements201 humains.
Émile DURKHEIM à propos de la sociologie use d’un paradigme holistique202. Pour lui et ceux qui se réclament de son héritage, la société est un «holon», un tout qui est supérieur à la somme de ses parties, elle préexiste à l’individu et les individus sont gouvernés par elle.
Dans ce cadre, la société englobe les individus et la conscience individuelle n’est vue que comme un fragment de la conscience collective. La sociologie politique, pour sa part, étudie les citoyens dans leurs rapports avec l’Etat et ses institutions. Il s’agit, aussi, d’une façon plus générale, d’analyser tout ce qui concerne et fonde les relations de domination entre les personnes et les groupes humains. La discipline répond ainsi aux rapports sociaux à caractère politique, en particulier les idéologies et les forces politiques tels que les partis.
Selon ce point de vue, l’objet des recherches sociologiques est le fait social, qu’il faut traiter comme une chose, sa cause devant être cherchée dans des faits sociaux antérieurs. Le fait social, qui fait l’objet d’une institutionnalisation, est extérieur à l’individu et exerce une contrainte sur ce dernier. Les individus sont donc encadrés dans des institutions, elles-mêmes insérées dans des structures homologues les unes par rapport aux autres.
La sociologie est alors la science des invariants institutionnels dans lesquels se situent les phénomènes observables. Marcel MAUSS imprimera une inflexion significative à cette doctrine en arguant de la nécessité de décrire complètement et dans leur totalité les formes dans lesquelles le phénomène apparait pour révéler leur secret. Analyser le concret interdit de négliger la sensibilité au vécu.
Plus récent mais certainement porteur, Jean BAECHLER a développé un paradigme entre l’histoire et la sociologie, une méthode qui reprend certains axes des études «simmeliennes», et qui se pose sur les fondements des critiques de la raison historique recensées par Raymond ARON pour rendre compte du devenir des phénomènes sociaux macroscopiques203.
Quant à l’anthropologie, c’est la branche des sciences qui étudie l’être humain sous tous ses aspects, à la fois physiques204 et culturels205. Elle tend à définir l’humanité en faisant une synthèse des différentes sciences humaines et naturelles. Le terme «anthropologie» vient de deux mots grecs, «anthropos», qui signifie «homme»206, et «logos», qui signifie «parole, discours».
Cette discipline vise particulièrement les faits spécifiques à l’humain par rapport aux autres animaux207: langages articulés et figuratifs, rites funéraires, politiques ou magiques, arts, religions, coutumes, parenté, habitats, techniques corporelles, instrumentales, de mémorisation, de numération, de représentations spatiales et temporelles, etc. Elle s’appuie notamment sur l’étude comparative des différentes sociétés et ethnies décrites par l’ethnologie, et envisage l’unicité de l’esprit humain à travers la diversité culturelle.
Sans prétendre à l’exhaustivité et à l’exclusivité, nous voulons orienter notre modeste analyse à travers ces deux positions théoriques à savoir l’anthropologie et la sociologie politique dans la mise en exergue de l’influence variable, inégale existant entre l’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun. Ce qui nous suggère la formulation de la problématique et des hypothèses qui suit.
PROBLÉMATIQUEET HYPOTHÈSES
La problématique (1-) précède les hypothèses (2-).
1. PROBLÉMATIQUE
La problématique d’une recherche est l’approche ou la perspective théorique qu’on décide d’adopter pour traiter le problème posé par la question de départ. Elle est une manière d’interroger les phénomènes étudiés en vue d’obtenir de nouvelles informations208. C’est en quelque sorte un écart ou un manque à combler dans le domaine de la connaissance entre ce que nous savons et ce que nous devrions ou désirons savoir sur le réel209. Partant de ces considérations qui précèdent, la problématique « devient » une étape-charnière de la recherche située entre la rupture et la construction210. Car, c’est elle qui permet de constater l’écart entre une situation de départ insatisfaisante et une situation d’arrivée désirable211.
Pour y parvenir, il faudra dans un premier temps exploiter les lectures et faire le point sur les différents aspects du problème qui y sont mis en évidence afin de mieux méditer comme personne n’a encore médité sur ce que tout le monde a devant les yeux212.
Il nous revient ainsi de construire une problématique qui sied à notre travail de recherche. Ce qui a été fait par la revue critique de littérature. La préoccupation des relations de l’administration allemande avec les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun durant la période de 1884 à 1916, tire ses origines des conséquences et des effets que la colonisation allemande a engendrés sur le fonctionnement sociopolitique de ces deux types de sociétés : l’une, Bamoun, centralisée autour d’un Roi/Sultan et l’autre, Duala, dont le pouvoir est soumis à l’influence de plusieurs chefs qui gèrent les différents cantons. C’était d'ailleurs le prince BELL qui faisait office de « chef » coordonnateur, et qui présidait à toutes les cérémonies officielles telles que le « Ngondo ».
Eu égard à ce qui précède, notre question centrale est la suivante :
- Quelle est l’influence mutuelle entre l’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun au regard de l’histoire politique du Cameroun? En d’autres termes, comment ces institutions ont eu un impact l’une sur l’autre?
Autour de cette question centrale, s'ajoutent des questions connexes à savoir:
- Comment s’est exercée la domination de l’administration coloniale allemande sur les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun ?
- Quelle est la part de l’influence des pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun sur l’administration coloniale allemande?
Consécutivement au travail de terrain, nous avons formulé des hypothèses .
2. Hypothèses
Élément déterminant de spécification de l’étude, au même titre que la problématique, l'hypothèse est une proposition de réponse à la question posée. Elle est nécessaire au sens où l'indique Claude BERNARD: « Si l'on expérimentait sans idées préconçues, on irait à l'aventure". Il donnait en effet de l'hypothèse la définition suivante»... une interprétation anticipée et rationnelle des phénomènes» 213 . Comme on le constate, il n'y a pas d'observation sans formulation d'hypothèse de recherche, si sommaire soit-elle. Et Claude BERNARD ajoute ceci : «Une observation aveugle de la réalité n'est pas possible et, comme on l'a dit, à ne pas savoir ce que l'on cherche, on risque de ne pas savoir ce que l'on a trouvé» 214 .
Ainsi, notre étude comporte une macro-hypothèse et des micro-hypothèses.
Notre hypothèse principale ou macro-hypothèse est la suivante :
- Il existe une influence variable, inégale entre l’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun au regard de l’histoire politique du Cameroun.
Des hypothèses connexes ont été agencées pour éclairer davantage l'hypothèse principale. Elles sont construites autour de deux axes essentiels et représentent chacune une réponse opératoire aux problématiques secondaires sus énoncées :
1 – L’administration coloniale allemande a dominé les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun non seulement par l’application du principe de l’Hinterland, mais aussi au regard des logiques et dynamiques de domination qui donnent à voir le conflit et la coopération.
2- Les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun ont exercé une influence certes, mais relative sur l’administration coloniale allemande du fait de l’adaptation de l’administration coloniale allemande à la gouvernance traditionnelle Bamoun d’une part; et du pragmatisme de situation de cette administration coloniale allemande à l’égard des chefs Duala, d’autre part.
7. INTÉRÊT DE L’ÉTUDE
Dans toute recherche scientifique, le chercheur doit exprimer la pertinence ou portée scientifique du sujet en indiquant en quoi ce sujet s’inscrit dans les préoccupations scientifiques, en quoi ce sujet contribuera à l’avancement des connaissances et en quoi le sujet est original et d’actualité, surtout sous l’angle abordé215. Ainsi, l’intérêt suppose de relever l’utilité de l’étude dans un système de pensées et d’actions.
A cet effet, l’étude envisage de positionner au centre d’un débat heuristique, la problématique de l’influence mutuelle entre l’administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala au regard de l’histoire politique du Cameroun.
Il revient de faire part de l’impact réciproque en analysant les mécanismes d’adaptation des chefferies traditionnelles Duala et Bamoun au pouvoir colonial allemand d’une part, et d’autre part, de l’administration coloniale allemande aux gouvernances traditionnelles Duala et Bamoun.
Si l’on s’accorde avec Max WEBER que le «travail scientifique est solidaire d’un progrès»216, notons également à la suite d’Alfred GROSSER217 que les connaissances qui s’en dégagent sont bien cumulatives. De ce fait, le but de toute production scientifique est de confirmer l’utilitéde la science («recherche de la vérité»)218 dans le développement social.
Il s’agit pour nous, dans la présente étude, de nous inscrire dans la suite de nos devanciers en essayant d’approfondir les études d’anthropologie politique. Ainsi, le sujet portant sur «l'administration allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala de 1884 à 1916, analyse de l'histoire politique du Cameroun», s'inscrit dans le champ disciplinaire de la science politique.
Notre étude, de manière générale, envisage les liens étroits entre l'administration allemande et les pouvoirs politiques traditionnels de 1884 à 1916. En d’autres termes, il s’agit des faits marquants ayant jalonné cette collaboration ou coopération et leur incidence dans l'histoire politique du Cameroun. C’est donc une étude qui revêt à la fois un intérêt tant heuristique que pragmatique.
D'un point de vue heuristique, nous pouvons dire que la conquête allemande a été à double tranchant. Quel est le nombre [supposé] exact des exécutions, des populations soumises aux travaux forcés et au racket?
La colonisation allemande a-t-elle eu un rôle positif ou plutôt négatif sur l'évolution politique du Cameroun. En quoi et dans quel [s] secteur [s] marquant [s] les sociétés politiques traditionnelles Bamoun et Duala ont-elles été profondément marquées par l'administration allemande?
C'est donc une analyse qui, en suivant le chemin ouvert par des prédécesseurs, ouvre aussi de nouveaux horizons. Car elle nous permet, en outre, de comprendre que les sociétés Bamoun et Duala ont bénéficié de l'expertise et du savoir-faire de l’administration allemande.
Par ailleurs, il est également question de voir que la colonisation allemande a permis de considérer que le Cameroun était une zone à exploiter, et que les populations allaient servir de main d'œuvre à cette opération. Sur le terrain, les Allemands ont créé de grandes plantations de produits d'exportation.
La signature des différents traités permettait ou n'autorisait pas à occulter la dimension répressive et brutale des méthodes employées pour atteindre leurs objectifs. Et l'épisode des multiples révoltes dans les plantations, allant même, jusqu'à la grève de l'impôt témoigne de ces tensions entre les Allemands et les populations camerounaises.
Toutefois, il faut reconnaitre que les Allemands ont désenclavé le Cameroun à travers l'évacuation des produits cultivés. En effet, ces derniers construisirent des routes, des ports, et surtout des chemins de fer. Ils mirent également en place les premières infrastructures télégraphiques, téléphoniques et radiotélégraphiques.
Il s'agit donc de voir de quelle manière les chefs traditionnels, en particulier ceux Bamoun et Duala, ont participé et subi l'expansion de la conquête allemande au Cameroun. Négliger cet aspect, c'est oublier que tous les acteurs ont eu à mettre en lumière différents angles et aspects de la colonisation aussi glorieux qu'obscurs.
Ces hypothèses ont été vérifiées en fonction d'une orientation méthodologique appropriée.
8. CONSIDÉRATIONS MÉTHODOLOGIQUES ET OPÉRATOIRES
La théorie est un «ensemble intégré de concepts et de sous concepts que l'on tente habituellement d'utiliser pour mieux structurer l'explication de la réalité»219. L'impératif d'expliquer la réalité conditionne même la valeur scientifique de la théorie.
Car, comme affirmait Michel BEAUD : «La théorie ne peut se juger à sa seule cohérence interne, mais par rapport à sa capacité à rendre compte du réel» 220. Cependant, toute théorie ne peut expliquer qu'un volet seulement de la réalité sociale. Il faut également recourir à la méthode.
En toute science, la première condition du progrès c’est la méthode221. La méthode se trouve donc être l’ensemble des opérations intellectuelles qu’une discipline met en œuvre pour démontrer, vérifier et établir les vérités qu’elle poursuit222. Ainsi dans le processus de recherche en sciences sociales, le chercheur doit toujours se comporter comme un chercheur de pétrole.
C’est ainsi dire que de même que le chercheur de pétrole mobilise des outils méthodologiques qui lui permettront de parvenir à ses fins pétrolières, de même, le chercheur devra en faire autant pour cerner son objet d’étude223. Ce faisant, dans la perspective de notre travail, nous avons usé d’un syncrétisme méthodologique qui prend en compte les méthodes d’analyse d’une part (A-) et d’autre part, les techniques de collecte des données (B-).
9. LES MÉTHODES D’ANALYSE
La méthode est une notion ambiguë qui renvoie à plusieurs acceptions. Madeleine GRAWITZ retient d'ailleurs trois sens. Du point de vue philosophique, la méthode représente «l’ensemble des opérations intellectuelles pour lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités qu'elle poursuit, les démontre, les vérifie» 224 . Par rapport à l'objet d'étude, elle devient une «façon d'envisager ou d'organiser la recherche» 225.
Enfin, elle désigne souvent une notion propre à une discipline des sciences sociales226. Quel que soit le sens considéré, la méthode demeure importante dans le processus de la recherche scientifique. Elle «accroit la capacité explicative du discours de la recherche scientifique en l'affinant davantage de manière à lui donner plus de crédit». 227
L'analyse des données obéit à une démarche méthodologique précise. Dans cette étude, trois méthodes sont employées. Nous avons entre autres, la méthode historique (1-), la méthode comparative (2-) et le constructivisme (3-).
1. La méthode historique
L’approche culturaliste et historique est un courant de l’anthropologie né aux États-Unis sous l’impulsion principale de Ruth BENEDICT, Ralph LINTON, Abram KARDINER et Cora DUBOIS. Elle tente une description de la société sous les points de vue conjugués de l’anthropologie et de la psychanalyse.
Le culturalisme constitue un des courants qui a dominé la sociologie américaine des années 1930 jusqu’aux années 1950. En empruntant la notion de culture aux anthropologues, il cherche à rendre compte de l’intégration sociale.
S’appuyant sur l’observation des sociétés archaïques, les culturalistes mettent en évidence l’influence prépondérante de la culture et des habitudes culturelles d’éducation sur la personnalité de base des individus.
L’approche culturaliste et historique228 nous permettra d’amorcer un recueil chronologique sur l'histoire politique du Cameroun pendant la période coloniale allemande. En effet, on se rend compte que les relations existantes entre l'administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala ont donné lieu à des situations complexes, ambiguës empreintes de méfiance, de brutalité, de respect mutuel, et, surtout, d'alliances entre les différents acteurs.
Quant au champ de la sociologie et de l’anthropologie politiques dans lesquels nous nous situons, la méthode historique va combler les lacunes des faits et des évènements en s'appuyant sur un temps, peut-être artificiellement reconstruit, mais assurant une continuité, et un fil conducteur pour notre étude229.
Cela est d'autant plus pertinent lorsqu'on sait avec Marcel MAUSS et Paul FAUCONNET qu'on n'a pas besoin de connaitre la date d'un fait social pour s'en servir, pourvu que l'on connaisse ses antécédents, ses concomitants, ses conséquents, en un mot tout le cadre social230.
Dans le cadre de notre étude, la méthode historique nous a permis de retracer la période coloniale allemande au Cameroun, ainsi que les liens ayant existé entre l'administration allemande et les différentes autorités traditionnelles qui ont eu un impact sur l'évolution sociopolitique du Cameroun.
Cette approche a aidé, à travers la diachronie et la synchronie, d'apprécier l'influence que la colonisation allemande a eue sur les sociétés traditionnelles Bamoun et Duala, et, inversement, l’influence de ceux-ci sur celle-là.
2. La méthode comparative
L'analyse comparative consiste à rechercher les différences et les ressemblances existant entre les situations qui font l'objet de la comparaison, en interprétant la signification de ces ressemblances et de ces différences et en essayant de découvrir à travers elle des régularités. Émile DURKHEIM précisait le mécanisme fondamental de la comparaison en ces termes : « Nous n'avons qu'une matière de démontrer qu'entre deux faits il existe une relation logique, un rapport de causalité par exemple, c'est de comparer les cas où ils sont simultanément présents ou absents et de rechercher si les variations qu'ils présentent dans ces différentes combinaisons de circonstances témoignent que l'un dépend de l'autre» 231 .
En effet, l'analyse comparative ne peut valablement être utilisée que si les situations choisies pour la comparaison présentent un certain degré d'analogie. La comparaison ayant pour but de relever et d'étudier les ressemblances et les différences existant entre les phénomènes comparés, ceci suppose qu'il existe entre ces phénomènes des ressemblances : c'est l'analogie.
Mais si ces phénomènes ne sont pas totalement identiques, faute de quoi la comparaison n'aurait plus aucun intérêt. C'est dire que deux points de vue doivent être pris en considération pour apprécier la validité d'une comparaison et le degré d'analogie des faits comparés. D'une part, les faits comparés doivent présenter une certaine analogie des structures et d'autre part, ils doivent présenter une certaine analogie de contexte.
En premier lieu, l'analogie des structures revêt deux significations. Elle suppose que les phénomènes étudiés ont une physionomie générale assez proche. Ainsi, peut-on comparer la société traditionnelle Bamoun avec la société traditionnelle Duala, etc.
De plus, le degré de complexité des faits comparés ne doit pas être trop éloigné. De la sorte, on peut comparer les relations de l'administration coloniale allemande avec le Roi Bamoun et les chefs Duala, mais il sera beaucoup aléatoire de comparer le fonctionnement de la société allemande avec le Cameroun précolonial en raison de la complexité différente de ces deux phénomènes.
Dans la pratique, "cette appréciation de l'analogie des structures n'est pas très facile à réaliser du fait de la multiplicité des éléments qui compose la structure des faits sociaux" 232 . A cet égard, l'existence des typologies solidement fondées peut faciliter le travail du comparatiste.
En second lieu, l'analogie de contexte doit être prise en considération étant donné que les phénomènes sociaux n'existent pas de manière isolée. Ils sont intégrés dans un ensemble dont ils ne sont pas séparables sans risque de dénaturation. En effet, pour comprendre un phénomène social, il importe de ne pas négliger le contexte dans lequel il se situe.
Ce contexte est envisageable à un double niveau. Le contexte dimensionnel commande que le chercheur ne compare que deux phénomènes sociaux appartenant à des ensembles sociaux de dimension analogues. Il est dans ce sens évident que les problèmes posés par l'administration d'un village de 350 habitants sont difficilement comparables avec ceux posés par une ville de 150 000 habitants. Cependant, la difficulté réside ici sur la précision du critère à partir duquel le chercheur attend apprécier le contexte. Est-ce l'étendue du territoire ou alors le volume de la population ?
Par ailleurs, l'on ne peut ignorer le contexte culturel des faits comparés en entendant par-là l'ensemble des valeurs, des croyances, des traditions, des mœurs, des institutions, etc., qui constituent l'ensemble culturel, l'aire de civilisation dans lesquels s'insèrent les faits comparés. De plus, deux types de comparaison sont mis à la disposition du chercheur.
D'abord les comparaisons proches que nous utiliserons dans le cadre de cette étude, portent sur des phénomènes présentant un assez fort degré d'analogie, tant par leur structure que par le contexte dans lequel ils se situent. De fait, ce type de comparaison vise avant tout à la précision : elle est minutieuse, scrupuleuse et détaillée. En revanche, les comparaisons éloignées se caractérisent par les libertés qu'elles prennent avec l'exigence de l'analogie. Elles portent sur des phénomènes de structures assez différentes, dont le contexte dimensionnel et culturel peut être assez éloigné233.
En rapport avec la présente étude, il y a recours à des référentiels prédéterminés234 pour pouvoir établir les points de convergences et de divergences entre les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala. Une étude de leurs structures et notamment des processus de transformation au fil des évènements majeurs de la colonisation allemande au Cameroun permet de comprendre la situation.
D'abord, elle a aidé à mettre en évidence la manière dont les colons allemands sont entrés en contact avec les chefferies traditionnelles suscitées, et comment ces dernières ont participé positivement ou négativement à l'expansion de cette conquête. Ensuite, on peut se demander où se trouve la pertinence d'une telle ouverture pour la transformation et l'évolution de ces sociétés traditionnelles au fil du temps.
Enfin, il s'est agi de poser la question de savoir si tous les acteurs de cette période coloniale ont pu être mis en lumière ainsi que leurs rôles exacts? Qui plus est, la comparaison amène à souligner une influence inégale, du fait de la domination de l’administration coloniale allemande, mais une influence relative des pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun.
L’administration coloniale allemande s’est démarquée au niveau des infrastructures qui sont encore visibles de nos jours. Il faut également ajouter que la chefferie Bamoun a été plutôt coopérative alors que les chefferies Duala se sont plutôt opposées à celle-ci notamment à cause de l’expropriation de leurs terrains.
3. Le constructivisme
Le constructivisme, théorie de l’apprentissage, a été développé, entre autres, par PIAGET, dès 1923, face au behaviorisme qui, d’après lui, limitait trop l’apprentissage à l’association stimulus-réponse et considérait le sujet comme boite noire. L’approche constructiviste s’intéresse à l’activité du sujet pour se construire une représentation de la réalité qui l’entoure235. Le constructivisme part de l’idée que les connaissances de chaque sujet ne sont pas spécialement une «copie» de la réalité, mais un modèle plus ou moins fidèle de celle-ci construit par lui au cours du temps.
Le constructivisme s’attache à étudier les mécanismes et processus permettant la construction de ce modèle chez les sujets à partir d’éléments déjà intégrés. On est donc à l’opposé d’une simple approche «boite noire»236. Plus largement, pour le constructivisme, le développement progressif d’un organisme depuis sa conception jusqu’à sa forme mure237 résulte de la construction d’organisations relativement stables qui se succèdent dans le temps238. Le constructivisme se décline en différents courants de pensée en fonction des disciplines épistémologiques dont les sciences formelles, les sciences exactes, ou encore, les sciences sociales auxquelles il s’applique.
En sociologie, le constructivisme social ou socioconstructivisme, est une vision de la sociologie contemporaine développée par Peter L. BERGER, sociologue et théologien américain d’origine autrichienne, et Thomas LUCKMANN, sociologue allemand dans leur livre The Social Construction of Reality 239.
S’appuyant sur des arguments théorisés par Émile DURKHEIM, cette approche considère que la réalité sociale et les phénomènes sociaux sont créés et institutionnalisés et s’intéresse à la façon dont cette réalité est construite240. Chez BERGER et LUCKMANN, la réalité est comprise d’un point de vue subjectif plutôt qu’objectif, c’est-à-dire telle que nous pouvons la percevoir plutôt que séparée de nos perceptions241. C’est pourquoi Boris CYRULNIK déclare: «Une institution est structurée comme une personnalité, avec des murs et des règlements qui matérialisent la pensée de ceux qui ont le pouvoir» 242 .
Par ailleurs, Alfred SCHUTZ pense que l’action sociale s’enracine au sein d’un environnement comportant un rapport à autrui qui s’articule autour d’un axe temporel et d’un axe spatial. Ce dernier remarque que le monde social est constitué d’acquis dont l’intégration est implicite dans les actions et les intentionnalités pratiques. Dans son quotidien, l’individu acclimaté à une culture intègre un ensemble de savoirs et savoir-faire qui aura le caractère d’allant de soi243, ces savoirs et savoir-faire étant tenus pour acquis- jusqu’à ce qu’il y ait altérité244.
Quant au constructivisme structuraliste encore appelé interactionnisme stratégique, c’est une méthode développée par Pierre BOURDIEU, Erhard FRIEDBERG et Michel CROZIER. Pour eux, les entités sociales sont des acteurs sociaux qui sont en interaction dans un champ.
Ce champ est semblable à un champ de forces en physique où se choquent et s’entrechoquent les différents acteurs en présence. Ici, l’acteur n’existe pas en dehors du système qui définit sa liberté. De même, le système n’existe que par l’acteur qui seul peut le porter et lui donner vie245.
Ainsi, l’on parle d’interaction stratégique car de même que le milieu impose à l’individu un répertoire de disposition durable que BOURDIEU appelle habitus246, de même l’individu à travers la marge de manœuvre et de liberté qui lui est offerte, va mouvoir des stratégies qui lui permettront non seulement de satisfaire les exigences sociales, mais aussi de se satisfaire lui-même. On assiste donc là à un double mouvement d’intériorisation de l’extériorité et de l’extériorisation de l’intériorité.
Se ramenant à notre étude, le constructivisme a produit des règles et instruments juridiques tels que les traités et les arrêtés. Par exemple, la loi du 19 juin 1895 ainsi que le règlement de police du 22 mai 1895 interdisaient notamment aux Duala de faire du commerce dans leurs régions habituelles, leur retiraient leur main d’œuvre, et la chasse leur sera interdite par la suite. Les Allemands procéderont aussi à une dévaluation de l’unité monétaire, le «Kroo». A cet effet, si avant 1884, le «kroo» valait 20 marks, il sera réduit en 1885 à 12 marks et en 1891, à 10 marks.
Par un décret du 06 avril 1894, il sera complètement aboli, et le mark allemand, deviendra l’unique monnaie du territoire247. Par contre, le traité du 12 juillet 1884 va consacrer la naissance du Cameroun international. Cela a produit des effets de réalité à savoir les effets émergents et les effets pervers.
10. LA TECHNIQUE DE COLLECTE DES DONNÉES
Bien qu'elle trouve ses origines et des développements dans les sciences sociales telles que l'histoire et la sociologie, la collecte des données n'est pas étrangère à la discipline de la science politique.
Les techniques constituent «des moyens d'aborder les problèmes, lorsque ceux-ci sont précisés» 248 . Elles représentent des «procédés limités, mettant en jeu des éléments pratiques, concrets, adaptés à un but pratique et défini» 249 .
À cet effet, et pour ne pas nous démarquer de cet avertissement de David EASTON, il nous a semblé porteur de mener nos investigations sur plusieurs fronts. Pour cet auteur en réalité : «Si nous nous trouvons à une trop grande distance, nous ne pouvons voir que les grandes lignes, et cela n'a que peu d'intérêt pour une recherche utile; mais si nous restons trop près, nous verrons les détails si nombreux et si confus que cela ne vaudrait guère» 250 . Dans le cadre de notre travail, les techniques sont les procédés qui nous ont permis de recueillir les informations essentielles pour la compréhension de notre étude.
En termes de collecte données, nous avons recouru à la fois les techniques documentaires (1-) et les techniques vivantes (2-).
1. Les techniques documentaires
L'expression document est prise ici dans un sens large. D'après Jean-Louis LOUBET DEL BAYLE, il s'agit de «tout élément, matériel ou immatériel, qui a un rapport avec l'activité des hommes vivant en société et qui de ce fait constitue indirectement une source d'informations sur les phénomènes sociaux» 251. Ainsi, il n'y a pas de contact immédiat entre l'observateur et la réalité sociale dans l'observation documentaire.
C'est dire que les documents se présentent au chercheur à l'état brut et, pour en extraire les renseignements qui lui seront utiles, celui-ci doit procéder à leur analyse, à leur interprétation et dans certains cas à leur réinterprétation252.
Ce qui est important pour le chercheur, c'est la détection aussi bien de la signification évidente que la signification implicite du document. Ce qui fait l'intérêt de l'analyse du contenu des documents, dans sa dimension qualitative valorisée ici à celle quantitative en fait aussi sa faiblesse.
En effet, l'analyse quantitative du contenu consiste à étudier les documents en dénombrant les différents éléments qui le constituent, en les classant, en chiffrant leur fréquence, leur répétition. Si elle apparait plus objective que l'analyse qualitative, ses résultats sont aussi souvent plus superficiels. La finesse de l'analyse ici se paie par des risques de subjectivité dans la mesure «où sa valeur dépend en grande partie de la sureté de jugement de celui qui procède à l'analyse» 253.
La distinction de ce qui est important et de ce qui est secondaire, de l'essentiel et de l'accessoire, donne lieu à des jugements de la part du chercheur avec le risque que ceux-ci soient influencés par sa subjectivité. Le document représente un instrument fondamental de la recherche. Il «offre l'avantage d'être un matériau objectif en ce sens qu'il soulève les interprétations différentes, il est le même et ne change pas» 254 .
Dans le même ordre d'idées, Jean-Claude COMBESSIE remarque ce qui suit : «Dans toute recherche, les sources documentaires peuvent fournir à la fois des informations complémentaires et d'une diversification des éclairages» 255 . Ainsi, dans le cadre de notre étude, nous avons utilisé les ouvrages généraux en sociologie politique et en anthropologie politique à l’instar des ouvrages de Georges BALANDIER, «Sens et puissance. Les dynamiques sociales»256 ; de Guy HERMET et al., «Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques »257 ou encore de David EASTON, «Analyse du système politique»258.
Pour ce qui est des documents officiels, nous avons mis à notre actif, la constitution du 18 novembre 1996, le décret N°77/245 du 15 juillet 1977 portant organisation des chefferies traditionnelles, l’arrêté N°244 du 04 février 1933 fixant le statut des chefs indigènes. Ces documents nous ont informés sur les dispositions normatives liées au statut des chefferies traditionnelles et de donner un aperçu sur le rôle des chefs traditionnels dans la vie politique nationale.
Les données de notre étude seront recueillies dans des sources officielles afin de confirmer leur authenticité… Il sera question pour nous de parcourir les ouvrages, les thèses, les mémoires, les articles, et autres travaux scientifiques ayant un rapport direct ou indirect sur l’objet de recherche, l’histoire politique du Cameroun, la colonisation allemande, les chefferies traditionnelles, etc. Par ailleurs, nous avons consulté les archives nationales du Cameroun à Yaoundé, les archives du Palais Royal de Foumban.
Pour ce qui est des documents privés, nous avons recueilli par exemple, les documentaires intitulés «La Grande Guerre au Cameroun» du Lycée Dominique Savio à Douala portant sur les entretiens de MM. Ananie BINDJI259, Albert François DIKOUME260, Jean-Jacques ANNAUD261. Valère EPEE262 ; l’article rédigé par M. DJOKO DUBOIS à propos du «fonctionnement du pouvoir au sein de l’état colonial: le cas du Cameroun sous domination allemande à l’ère du Gouverneur VON SODEN 1895-1891» et disponible sur le site de l’Institut allemand au Cameroun263 ; les films documentaires «Deutsche Kolonien. Eine DVD –Edition zur deutschen Kolonialgeschichte» 264 du producteur Peter HELLER et «Quand les Anciens parlent…. Témoignages africains comme sources d’histoire coloniale» du Prince KUM’A NDUMBE III265.
C’est aussi le cas de la série du cinéaste camerounais Jean-Pierre BEKOLO nommée «Our Wishes: A Look on Colonial Africa», d’une durée de 26 minutes de 10 épisodes. «C’est un document que les chefs Duala ont rédigé pour faire connaitre aux Allemands leurs souhaits alors qu’ils étaient en train de négocier le traité qui confiait leur territoire à ces derniers. Mais ce document a été ignoré par les Allemands et on connait la suite. Au-delà de cette histoire, s’il y’a une constante dans les relations entre l’Afrique et l’Occident, c’est que nos souhaits ne sont jamais pris en compte. Vous avez compris l’esprit de tout le projet: il s’agit d’entrer dans notre histoire pour en tirer des leçons qui devraient nous servir d’aujourd’hui» 266 .
De même, nous avons utilisé les journaux tels que: le «Deutsches Kolonialblatt», pour l'administration locale au Cameroun; l’ «Amtsblatt Kolonialzeitung» pour la Société Coloniale Allemande ou la «Koloniale Rundschau»; Cameroon Tribune, Le Journal du Cameroun; les sites internet www.peuplesawa.com, www.dibambelasawa.com, www.auletch.com, etc., qui nous ont fourni des informations importantes sur le vécu quotidien des populations et des officiels, et du climat géopolitique de cette époque.
Nous avons aussi pu entrer en possession des memoranda que certaines autorités ont adressé à la haute hiérarchie.
Toutefois, l'observation documentaire s'est révélée à elle seule insuffisante pour permettre d'appréhender notre sujet dans ses différents contours, d'où le recours à une technique vivante.
2. Les techniques vivantes : les entretiens
«Si la théorie aide à bien voir et mieux comprendre un fait social, elle n'est utile que si elle s'appuie sur un matériel empirique collecté parallèlement par le chercheur dans un terrain circonscrit» 267 . C'est sur la base de ce principe élémentaire de la recherche fondamentale selon LESQUESNE268 que la deuxième étape de la collecte des données s'est voulue beaucoup plus pratique. La technique de l'entretien consiste «à provoquer une conversation réglée entre un enquêté et un enquêteur muni de consignes et le plus souvent d'un guide d'entretien» 269 . Cette technique trouve son fondement dans la nécessité de démontrer les hypothèses que nous avons formulées. A cet effet, pour analyser la question de l'administration allemande au Cameroun, il nous a fallu recourir à l'entretien des acteurs de cette période et de l'époque actuelle.
Nous avons eu des discussions fructueuses avec le Professeur d’Université, Directeur des Affaires Académiques et de la Coopération de l’Université de Yaoundé I, Pr. Daniel ABWA; le Secrétaire Général du Ngondo, M. Pamphile YOBE; le Directeur Adjoint de la Radio Communautaire du Noun, M. NJITARI NJOYA; le Directeur des Affaires Culturelles du Palais Royal de Foumban, M. NCHARE; le Guide conservateur du Musée depuis 2002, M. ALIDOU NJIKAM TOUNESSAH, un guide touristique de la ville de Foumban, Mme NGOUNGOURE BILKISSOU; d’un vieillisseur d’objets d’art de la ville de Foumban, M. OUSMANE.
Dans le cadre de notre enquête de terrain, nous avons choisi le département du Noun et en particulier la ville de Foumban. Nous avons également choisi les villes de Douala et de Yaoundé.
Foumban parce que c’est la ville où on localise le peuple Bamoun dans sa majorité et où se concentre les richesses les plus visibles de ce peuple guerrier. Quant à Douala, c’est un territoire qui concentre en son sein, les chefferies Duala riches en histoire et qui ont fait basculer le Cameroun en pleine modernité. Concernant Yaoundé, c’est le lieu où vivent les intellectuels et certains hommes de culture qui ont côtoyé ces deux peuples.
Sans ignorer l'apport des sources audiovisuelles,270 cette démarche à la fois théorique et pratique a permis d'opérer un croisement des données issues des diverses sources exploitées. L’usage de la démarche quantitative qui a facilité le croisement, qui à son tour, a aidé non seulement de pallier quelques lacunes des sources documentaires, mais surtout d'être en phase avec le fait empirique et la réalité matérielle du phénomène social qu'est la colonisation allemande au Cameroun, surtout ses répercussions sur les chefferies traditionnelles Duala et Bamoun.
A la suite de ce travail de terrain, nous avons définitivement arrêté les hypothèses qui font l’objet de démonstration.
CONCLUSION
Ce travail qui s’achève avait pour modeste ambition de montrer que la domination de l’administration coloniale allemande sur les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala était effective et était la résultante de la Conférence de Berlin en 1885. Ainsi avons-nous décliné dans un premier chapitre que le processus de conquête part du principe de l’hinterland et l’implantation progressive de l’administration coloniale allemande sur les territoires Bamoun et Duala. C’est pourquoi nous avons évoqué les prémices de chaque société traditionnelle Bamoun et Duala avant la pénétration allemande. Au sein de la société Bamoun, on observait un système bien organisé et hiérarchisé avec à sa tête un système de castes. Quant à la société Duala, elle était subdivisée en trois groupes principaux : les BELL, les AKWA et les DEIDO. Nous avons entrepris une chronologie de chaque dynastie Duala et de marquer les dissensions existantes entre elles.
Et dans un second chapitre, nous avons montré que l’administration coloniale allemande a exercé des dynamiques et des logiques de domination sur les pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala. En effet, la société Bamoun va subir les affres du christianisme et une frange importante de la population va remettre en question les habitudes païennes telles que la polygamie ou la voyance. L’autorité du Roi NJOYA sera ébranlée par ces valeurs occidentales de tolérance, d’égalité entre hommes et femmes, d’amour et de compassion envers ses ennemis. Il fera preuve de dureté envers les nouveaux convertis et fera tout pour imposer une religion syncrétique qui alliera le christianisme, l’islam et les pratiques culturelles traditionnelles. Par ailleurs, nous avons observé l’imprégnation de la culture européenne à la production artisanale Bamoun notamment sur le plan architectural. Quant à la société Duala, elle oscillera entre logiques de coopération et logiques de domination. Ainsi, les chefs Duala signeront des traités de diverses catégories qui leur permettront de bénéficier de retombées pécuniaires mais qui seront également le signe flagrant de divisions au sein de ces groupes.
Cet état de fait conduira l’administration coloniale allemande à un non-respect de la souveraineté des chefs Duala et à une atteinte des droits inaliénables des populations autochtones Duala dans la mesure où le plan d’expropriation du plateau Joss sera appliqué sans l’assentiment des concernés. Par la suite, les chefs Duala exerceront leur droit de revendiquer à travers des pétitions et des attaques armées qui se solderont par la déportation, la destitution ou la mise à mort des chefs récalcitrants.
Les autorités coloniales allemandes se sont imposées sans tenir compte des réalités socioéconomiques et culturelles des pouvoirs locaux. En conséquence, il en résultera de vives oppositions de la part des chefferies traditionnelles Bamoun et Duala. Les manifestations de ces oppositions sont nombreuses : le syncrétisme religieux du Roi NJOYA, la persistance de la polygamie en pays Bamoun, les pétitions et la recherche de la faveur de l’opinion publique allemande par les chefs Duala…. Il s’en suit un pragmatisme de situation de l’administration coloniale allemande à l’égard des chefs Duala à travers leurs perceptions respectives, les appréciations sommaires faites sur la personnalité de chaque monarque africain…Toutes ces propositions sont l’objet du chapitre IV après que, nous ayons préalablement analysé en profondeur l’adaptation de l’administration coloniale allemande à la gouvernance traditionnelle Bamoun dans le chapitre III.
Nous avons voulu mettre en lumière l’influence relative des pouvoirs politiques traditionnels Bamoun et Duala sur l’administration coloniale allemande. En effet, l’Allemagne s’est heurté aux actes rebelles du Roi NJOYA et a pris en compte les réalités socioculturelles de ce territoire de l’Ouest du Cameroun. La pratique de la polygamie, de la divination, de la peine de mort sera combattue avec beaucoup de difficultés et verra le triomphe de la religion musulmane et de la religion syncrétique créée par NJOYA. La perception de cette administration occidentale est assez bonne par le Roi NJOYA qui apprécie l’art de la guerre des Allemands et leurs techniques avérées dans le domaine de l’architecture entre autres. Et cette appréciation est réciproque puisque le souverain indigène est apprécié pour son dynamisme, son sens des responsabilités et son amour pour son peuple.
Quant aux chefs Duala, ils se verront attribués un salaire appelé Koumi par les autorités coloniales allemandes pour compenser la perte de leur monopole commercial. Cette situation fera remonter à la surface les tensions déjà existantes entre les différents potentats Duala et de la prééminence de la dynastie BELL, du fait de l’immense fortune engendrée et de sa plus grande proximité avec le pouvoir allemande. Mais cette entente sera de courte durée dès lors que la question foncière sera mise sur la table. L’expropriation du plateau Joss va dévoiler les véritables intentions des Allemands. La démarcation entre quartiers indigènes et quartiers blancs va entériner cet état d’esprit des chefs Duala. Il s’en suivra toute une série de revendications conduite par le chef Rudolf DOUALA MANGA BELL qui le paiera de sa vie, et qui deviendra un martyr tombé pour la cause du peuple Duala.
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[...]
1 Les Portugais découvrent le fleuve Wouri. L’abondance des crevettes (surtout l’existence d’une variété rare de grosses crevettes «béatoe» en langue locale) les amène à baptiser ce fleuve «Rio Dos Camaroes» (rivière des crevettes). Ce nom désigne ensuite le Littoral et devient «Cameroun» en passant par «Rio Dos Camaerones», «Cameroon River» et «kamerun» .
2 I. MOUICHE, «Le pouvoir traditionnel dans la vie politique moderne», Mémoire de Maitrise en Science Politique,Yaoundé, FDSE, 1988.
3 E. MVENG, Histoire du Cameroun, Présence Africaine, 1963, p. 138. In A. AHIDJO & G. BWELE, L’encyclopédie de la République Unie du Cameroun, Tome Deuxième: L’histoire et l’Etat, Douala, Les Nouvelles Editions Africaines, 1981, pp. 32-33.
4 Ibid., pp. 32-33.
5 Ibid., p. 35.
6 P. BOURDIEU, Réponses, Seuil, Paris, 1992, p. 207.
7 Les raisons de cette conversion de BISMARCK sont résumées dans H. BRUNSCHWIG, Le partage de l’Afrique noire, Paris, 1971, pp. 151 – 153, qui donne la bibliographie. Le fait décisif qui a motivé «le revirement de 1884» fut incontestablement le mémoire que le conseiller intime de légation aux Affaires étrangères, Henri DE KUSSEROW, adressa à BISMARCK le 8 avril 1884. Le fonctionnaire allemand y développait l’idée que, par le ballet des compagnies à charte, très en vogue dans les possessions anglaises, l’Allemagne pouvait acquérir des colonies sans que l’État se charge ni de leur administration ni de leur mise en valeur. Cette idée plut tellement à BISMARCK que le Chancelier décida de la mettre aussitôt en pratique. H. BRUNSCHWIG, L’expansion allemande outre-mer du XVème siècle à nos jours, Paris, PUF, 1957; «De la résistance africaine à l’impérialisme européen», in Peuples Noirs, Peuples Africains, N° 9, 1979, p. 69-80.
8 Cette note est datée du 14 avril 1883. Elle fut remise aux autorités des villes hanséatiques par M. DE ENTZEL, ambassadeur de presse à Hambourg. Cf. Das Staatsarchiv: Sammlung der offiellen Adenstucke zur Geschichte der Gegenwart, Volumes 42- 43, Leizpig, 1884, pp. 224-226.
9 Ibid., pp. 226 – 243.
10 Cameroun.
11 Das Staatsarchiv: Sammlung Der Offiziellen Aktenstucke Zur Aussenpolitik Der Gegenwart, Volume 63, p. 244.
12 Gustave NACHTIGAL connaissait parfaitement l’Afrique. Il avait parcouru les régions du Bornu, de l’Adamawa et du Tchad entre 1869 et 1874. Il avait présidé le comité allemand de l’Association Internationale Africaine et la Société de Géographie de Berlin. Il avait été nommé Consul Général d’Allemagne à Tunis en 1882, commissaire impérial pour l’Afrique occidentale le 17 avril 1884. Il mourut en mer, le 20 avril 1885, au cours de son voyage de retour. Cf. H. HEUER, Nachtigal: eine Biographie, Berlin, 1937; T. HEUSS & al., G. NACHTIGAL, 1869 – 1969, Bad Godesberg, 1969.
13 Ou Bansoh.
14 Qui est l'expression anglophone usuelle abordant la structure du pouvoir et la hiérarchisation des organisations sociales.
15 K. MARX & F. ENGELS, Manifeste du Parti communiste, 1848, Les classiques des sciences sociales, Université du Québec, p. 35. Voir «La lutte des classes – tensions dans une société hiérarchisée et divisée en classes sociales (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 22 mars 2022.
16 ENGELS précise que cette formule se limite à «l’histoire écrite». Il ajoute: «En 1847, l’histoire de l’organisation sociale qui a précédé toute l’histoire écrite, la préhistoire, était à peu près inconnue». (Note d’ENGELS de 1888 au Manifeste du Parti communiste). Voir«La lutte des classes – tensions dans une société hiérarchisée et divisée en classes sociales (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 22 mars 2022.
17 R. ROBINSON & J. GALLAGHER, «L’impérialisme du libre-échange» in The Economic History Review, vol. VI, n°1, 1953. Cet article constitue un essai révolutionnaire parmi les théoriciens de l’expansion impériale et «est réputé être l’article historique le plus cité jamais publié». Parlant des facteurs collaborationnistes, nous pouvons citer les chefs traditionnels. En effet, le colonisateur a consacré le statut des chefs traditionnels par l’arrêté N°244 du 04 février 1933 qui classait les chefs en trois catégories hiérarchisées: les chefs supérieurs, les chefs de groupements, et les chefs de village (Voir B. BALLA ONDOULA, «La chefferie traditionnelle face à l’émancipation politique du Cameroun», Mémoire, CHEOM, 1958-1959). A la fois auxiliaires de l’administration coloniale et représentants des populations, la position des chefs demeure ambiguë. Par réalisme et par nécessité bien comprise, le Cameroun indépendant fut amené à conserver les chefferies, relais de l’administration. C’était le meilleur palliatif à la sous-administration et le président AHIDJO affirmait à cet effet: «qu’indépendamment de leur aspect, de leurs caractères sentimentaux, les chefferies constituaient encore aujourd’hui et sans doute aussi pour demain, par l’encadrement des populations qu’elles assurent, des moyens d’action de l’Etat pour l’instant irremplaçables. Nos chefferies sont dans certains domaines des unités administratives indispensables». C’est ainsi que dans la loi N°7/5C du 10 décembre 1960, les pouvoirs publics les reconnurent de nouvelles règles dans la nomination et dans l’exercice des pouvoirs des chefs traditionnels. Les chefferies seront alors des institutions à part entière de l’administration camerounaise, collectant les impôts, officiant en matière d’état-civil, rendant justice, représentant les populations auprès des autorités et prêtant main forte à l’administration nationale nouvelle (Voir R. N’KAMGANG, «Les chefferies traditionnelles dans l’organisation administrative du Cameroun», Mémoire, CHEOM, 1960). In A. AHIDJO & G. BWELE, L’Encyclopédie de la République Unie du Cameroun, Tome 2 : L’Histoire et l’Etat, Douala, Les Nouvelles Editions Africaines, 1981, pp. 197-198.
18 R. ROBINSON, «Non-European foundations of European imperialism. Sketch for a theory of collaboration», in Studies in the theory of imperialism, Ed. Roger Owen/ Bob Sutcliffe, 1972, p. 118. Extrait en anglais traduit par nous en français: «The old notions for the most part were restricted to explaining the genesis of new colonial empires in terms of circumstances in Europ. The theory of future will have to explain how a handful of European Proconsuls managed to manipulate the polymorphic societies of Africa and Asia, and how, eventually, comparatively small, nationalist elites persuaded them to leave».
19 D. A. LOW, Essays in the study of British imperialism, London, 1973, p. 8.
20 K. HAUSEN, Deutsche Kolonialherrschaft in Afrika. Wirtschaftsinteressen und Kolonialverwaltung in Kamerun wahrend der deutschen Kolonialverrschaft, (1884-1914), Berlin, 1965.
21 Le Dr. G. WALZ de Freiburg / i. Br., «Die Entwicklung der Strafechtsprechung in Kamerun 1884 – 1914», 1980. Nous nous penchons sur sa connaissance juridique de la question coloniale au Cameroun.
22 K. HAUSEN, Deutsche Kolonialherrschaft in Afrika, Atlantis 1970; A. WIRZ, Vom Sklavenhandel zum kolonialen Handel, Atlantis, 1972; G. WALZ, Die Entwicklung der Strafrechtsprechung in Kamerun 1884 – 1914, Diss. Freiburg /Br. 1980.
23 Le Professeur Helmut STOECKER de l’Université Humboldt (Berlin-Est), éminent spécialiste de la période allemande au Cameroun. H. STOECKER, «Drang nach Afrika», Berlin, Akademie Verlag, 1977. H. STOECKER, «Kamerun unter deutscher Kolonialherrschaft», Berlin, Rutten & Loening, 1960, p. 68. H. STOECKER & H. MEHLS & E. MEHLS, «Die Froberung des Nordorstens». InSTOECKER (éd.), Kamerun unter deutscher Kolonialherrschaft II, 1968, p. 55-98.
24 P. MANDENG, Auswirkungen der deutschen Kolonialherrschaft in Kamerun, Hamburg, 1973.
25 J. GOMSU, Colonisation et organisation sociale. Les chefs traditionnels du Sud-Cameroun pendant la période coloniale allemande (1884-1914), Thèse de doctorat de 3ème cycle, Université de Metz, Faculté des Lettres et Sciences Humaines Saarbrücken, avril 1982, p.p. 11 - 12: (Nous ne livrons en aucun cas des arguments aux apologistes du colonialisme, bien au contraire, ce que nous disons ne disculpe en rien les colonisateurs).
26 Idem.
27 Plus qu’un rituel heuristique, préciser le sens des concepts utilisés, contribue à la circoncision et à la maîtrise de notre cadre d’étude.
28 R. QUIVY & L. VAN CAMPENHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Dunod, Paris, 1995.
29 E. DURKHEIM, Les règles de la méthode sociologique, Paris, 1ère édition, 1895.
30 Ordre public, bonne marche des services publics…
31 État, collectivités territoriales, établissements publics…
32 Fonctionnaires, contractuels…
33 LesDÉFINITIONS, « Définition de gestion ». Article consulté le 22 mars 2022 sur le site www.lesdefinitions.fr.
34 Idem.
35 AUNEGE, « Introduction à la gestion - Qu’est-ce-que la gestion? ». Article consulté le 22 mars 2022 sur le site http://ressources.aunege.fr. - Voir également I. CALME, J. HAMELIN, J. F. LAFONTAINE, S. DUCROUX, F. GERBAUD, Introduction à la gestion, Dunod, 3ème édition, 2013. - M. DARBELET, L. IZARD, M. SCARAMUZZA, Notions fondamentales de management, Editions Foucher, 5ème édition, 2006. - A. DAYAN, Manuel de gestion, Ellipses, 1999. - M. DE FABREQUES, Introduction à la gestion, Dalloz, 2ème édition, 2012. - J. M. PLANE, Management des organisations, Dunod, 2003. - P. POTTIER, Introduction à la gestion, Editions Foucher, 2001. - A. SCHATT& J. LEWKOWICZ, Introduction à la gestion d’entreprise, Editions EMS, 2007.
36 Qui veut dire «Agir».
37 LEXICO DICTIONARIES / ENGLISH, «Manage/Definition of Manage by Oxford Dictionary on Lexico.com also meaning of Manage». Article consulté le 20 octobre 2020.
38 M. OBADIA, «Type de management et symbolique de la main», dans Quelle économie voulons-nous? Pour en finir avec le toujours plus … (2003), Eyrolles, 2011, pp. 182-192.
39 R. A. THIETART, Méthodes de recherche en management, 1999, 586 pages.
40 J.-L. DELIGNY, L’Administration du futur: Culture et Stratégie (Management des administrations publiques), 1989, 233 pages.
41 H. FAYOL, Administration industrielle et générale, 1916. La « fonction administrative » d’Henri FAYOL où il faut faire fonctionner le «corps social» en lui donnant des directives et des tâches à accomplir. Il faut également harmoniser, unir, relier les actes et les efforts afin de faciliter le fonctionnement et le succès de l’organisation.
42 Principalement liée à la comptabilité analytique et aux méthodes de contrôle de gestion visant à optimiser les ressources.
43 Liée à la nécessité d’obtenir la motivation et la coopération des membres composant l’organisation.
44 R. DAHL, Qui gouverne? Armand Colin, 1971.
45 Seul ou représentant d’une organisation, d’un Etat…
46 Telle que celle des droits de l’Homme.
47 M. WEBER, Le Savant et le Politique, 1919.
48 Idem.
49 T. HOBBES, Léviathan ou Matière, forme et puissance de l’Etat chrétien et civil, 1651.
50 J.-J. ROUSSEAU, Du contrat social ou Principes du droit politique, 1762.
51 C. BAHATI NKINZINGABO, « Pouvoir coutumier et résistance à la décentralisation territoriale en RDC : regard sur la chefferie de Kabare », diplôme de licence, 2016. Article publié le 26 aout 2017 sur le site https://www.africmemeoire.com et consulté le 29 mars 2022.
52 M. WEBER, Économie et société, Paris, Plon, 1995.
53 H. MAMBI TUNGA, Pouvoir traditionnel et pouvoir d’Etat en RDC: Esquisse d’une théorie d’hybridation des pouvoirs politiques, UNIKIN, Thèse de Doctorat en Sciences Politiques.
54 C. BAHATI NKINZINGABO, « Pouvoir coutumier et résistance à la décentralisation territoriale en RDC : regard sur la chefferie de Kabare », diplôme de licence, 2016. Article publié le 26 août 2017 sur le site https://www.africmemeoire.com et consulté le 29 mars 2022.
55 Article 1 du décret royal du 05 décembre 1933.
56 Idem.
57 A. AHMADOU AHIDJO & G. BWELE, L’Encyclopédie de la République Unie du Cameroun, Tome Deuxième: L’histoire et l’Etat, Douala, 1981, pp. 197-198.
58 M. WEBER, Économie et société, Paris, Plon, 1995.
59 G. BURDEAU, Droit constitutionnel et Institutions politiques, LGDJ, 1972, p. 33.
60 P. BAILLY, «Conflits de classes et changement social chez MARX»: «la force de travail a la caractéristique de créer plus de travail que n’en nécessite son entretien. La plus-value est cette valeur supplémentaire produite par le salarié que le capitaliste s’approprie gratuitement et légalement (il y a un contrat de travail qui est passé entre eux)». Voir «Domination – situation dans laquelle un être et/ou un groupe est en position d’imposer ses idées (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 22 mars 2022.
61 K. MARX, Critique du programme de Gotha, p. 39. «Au lieu de la vague formule redondante qui termine le paragraphe: «éliminer toute inégalité sociale et politique», il fallait dire: avec la suppression des différences de classe s’évanouit d’elle-même toute inégalité sociale et politique résultant de ces différences». Ibid., p. 13. - Voir « Domination – situation dans laquelle un être et/ou un groupe est en position d’imposer ses idées (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 22 mars 2022.
62 C. RIVIÈRE, « DOMINATION », Encyclopædia Universalis [en ligne], article publié sur le site http://www.universalis.fr/encyclopédie/domination/ et consulté le 18 janvier 2019.
63 Ou de la femme, bien entendu.
64 A. COLLOGNAT, «AUCTORITAS. Autorité: un mot, une notion clé», article publié le 08 décembre 2019sur le site https://eduscol.education.fr et consulté le 14 mars 2022.
65 Idem.
66 M. HUMBERT, Institutions politiques et sociales de l’antiquité, Paris, Dalloz, 2014, p. 323.
67 A condition bien sûr, qu'elle soit régulière juridiquement.
68 Être à l’origine de, être l’ascendant de.
69 Se porter garant de l'identité, au travers de la transmission, de la mémoire, du lien passé/présent.
70 Projet.
71 Lois, décrets, arrêtés, etc.
72 Hiérarchies, organisations, structures, etc.
73 M. WEBER, Économie et société, Paris, Plon, 1995.
74 Idem.
75 Idem.
76 M. HUMBERT, Institutions politiques et sociales de l’antiquité, Paris, Dalloz, 2014, p. 323.
77 La synecdoqueest une métonymie (figure de style qui, dans la langue, ou son usage, utilise un mot pour associer une idée distincte mais qui lui est associée. L’association d’idées sous-entendue est souvent naturelle (partie/tout, contenant/contenu, cause/effet…), parfois symbolique (ex. couronne/royauté) ou encore logique: l’artiste pour l’œuvre, la ville pour ses habitants, le lieu pour l’institution qui y est installée, etc.) particulière pour laquelle la relation entre le terme donné et le terme évoqué constitue une inclusion ou une dépendance matérielle ou conceptuelle. Plus rarement, la synecdoque est évoquée lors d’une «Représentation abrégée d’un contour animal permettant, par seulement quelques tracés, de le reconnaitre» - Archéologie. Grotte Chauvet, glossaire. Voir « Définition: Métonymie (n. d.) ». Article publié sur le site www.lettres.org et consulté le 26 mars 2022. Voir « Métonymie. Figure de style (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 26 mars 2022. Voir « Synecdoque – terme littéraire (n. d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 26 mars 2022.
78 Les historiens et les historiennes.
79 «Histoire – évènements passés et leurs traces ou publications, étudiés par diverses branches des sciences humaines de l’histoire (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 22 mars 2021.
80 Idem.
81 A. PROST, Douze leçons sur l'histoire, Paris, Seuil, 1996, Coll. «Points Histoire», p. 146, 330 pages.
82 M. BLOCH, Apologie pour l'histoire ou Métier d'historien, introduction, p. IX.
83 Cité par A. PROST, Douze leçons sur l'histoire, Paris, Seuil, 1996, Coll. «Points Histoire», p. 146, 330pages.
84 Connaissances livresques sur les faits du passé, maîtrise de l'historiographie.
85 Méthodes d'analyse des sources et d'écriture de l'histoire.
86 « Histoire politique (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 22 mars 2022.
87 Idem.
88 Parfois de femmes.
89 Idem.
90 R. KOSELLECK, Le futur passé: contribution à la sémantique des temps historiques, Paris, Editions de l’EHESS, 2016, 2ème édition, 400 pages.
91 Pour la métropole.
92 G. BALANDIER, Sociologie actuelle de l’Afrique noire. Dynamique sociale en Afrique centrale, Quadrige/Presses Universitaires de France, pp. 4-5.
93 Ou à la rigueur l’élite.
94 M. PROUZET, Le Cameroun, Paris, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, Coll. «Comment ils sont gouvernés», p. 61.
95 Karl MARX & Vladimir LÉNINE cité par M. PROUZET, op. cit., p. 80.
96 M. PROUZET, Le Cameroun, Paris, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, Coll. «Comment ils sont gouvernés », p. 80.
97 G. NICOLAS, «Crise de l’Etat et affirmation ethnique en Afrique Noire contemporaine», Revue Française de Science Politique, octobre 1972, p. 1017.
98 M. PROUZET, Le Cameroun, Paris, Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence, Coll. «Comment ils sont gouvernés», pp. 39-40.
99 Jusqu’en 1966.
100 Ibid., p. 41- 42.
101 D. MAINGUENEAU, Les livres d'école de la République (1870 - 1914) : discours et idéologie, Paris, Le Sycomore, 1979, 343 pages.
102 URSS: Union des Républiques Socialistes Soviétiques.
103 C. AMALVI, De l'art et la manière d'accommoder les héros de l'histoire de France, Paris, Albin Michel, 1988, 473 pages.
104 Deido.
105 Akwa.
106 A. AHIDJO & G. BWELE, L’encyclopédie de la République Unie du Cameroun, Tome Deuxième: L’histoire et l’Etat, Douala, Les Nouvelles Editions Africaines, 1981, p. 35.
107 Ibid., pp. 48-50.
108 Mbankim.
109 « Royaume bamoun – ancien pays (n. d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 18 mars 2022.
110 JOURNAL CAMEROUN INFO, «Les Bamoun auront-ils leur province?», article publié sur le site www.cameroun-info.net et consulté le 18 mars 2022.
111 700 mètres.
112 1910 mètres.
113 2200 mètres.
114 « Royaume bamoun – ancien pays (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 18 mars 2022.
115 P. ETONDE, «Les chefferies traditionnelles entre tradition et modernité: le cas du Royaume Bamoun», Mémoire, Université de Yaoundé II, 2014-2015, p. 11.
116 Sultan I. NJOYA, «Histoire et coutumes des Bamoun», Mémoires de l’Institut français d’Afrique Noire (Centre du Cameroun), série: Population N°5, 1952, p. 43. In P. ETONDE, «Les chefferies traditionnelles entre tradition et modernité: le cas du Royaume Bamoun», Mémoire, Université de Yaoundé II, 2014-2015, p. 61.
117 B. R. GUIMDO DONGMO, Séminaire de théorie sur le sens et l’effectivité du droit. Cité par J. J. FOMBA TALA, «Lutte contre le terrorisme et droits de l’homme en Afrique», Université de Yaoundé II-SOA, 2013, 2014, Mémoire de Maitrise, p. 4.
118 O. PATZIG, Die afrikanische Konferenz und der Congostaat, Heidelberg, 1885. F. FROMHOLD DE MARTENS, «La Conférence du Congo à Berlin et la politique coloniale des États modernes», Revue de Droit International et de Législation Comparée, XVIII, 1886, pp. 137 sq.; H. CRIBIER, «l’Europe, le Congo et la Conférence africaine de Berlin», Annales de l’École Libre des Sciences Politiques, IV, 1889, pp. 487-514; S. E. CROWE, The Berlin West African Conference, 1884-1885, London, 1942.
119 Cette liberté commerciale impliquait la liberté de navigation pour les navires de toute nationalité sur le Congo et ses affluents, l’entrée en franchise dans tous ces territoires des marchandises importées et enfin l’égalité de droit au point de vue économique et commercial pour tous les Européens appelés à s’établir dans ces territoires.
120 De 1884 à 1901 et de 1909 à 1910.
121 M. ONDOA, Cours de méthodologie de la recherche, D.E.A, Droit Public Fondamental 2009-2010, p. 14.
122 M. GRAWITZ & J. LECA, Traité de science politique, Presses Universitaires de France, 1985.
123 W. VON TROTHA, Gegen Kirri und Buchse in Deutsch-Sudwestafrika: vaterlandische Erzahlung von dem Kampfe in Sudwest, Breslau: Goerlich, 1911. Voir également LE FIGARO.FR, « Colonialisme: l’Allemagne reconnait avoir commis un génocide en Namibie », article mis à jour le 28/05/2021 et consulté le 05 mai 2022. Voir Wikipédia, « Colonisation (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le mardi 07 novembre 2017.
124 P. N’DA, Méthodologie et guide pratique du mémoire de recherche et de la thèse de doctorat en Lettres, Arts et Sciences humaines et sociales: informations, recommandations universitaires, techniques et pratiques actuelles, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 109.
125 Pour R. QUIVY & Luc VAN CAMPENHOUDT, la «gloutonnerie livresque» est une attitude qui consiste à se bourrer le crâne d’une grande quantité de livres et d’articles en espérant y trouver au détour d’un paragraphe, la lumière qui permettra de préciser enfin correctement et de manière satisfaisante l’objectif du thème de travail que l’on souhaite effectuer. Voir R. QUIVY & L. VAN CAMPENHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Dunod, Paris, 1995.
126 P. N’DA, Méthodologie et guide pratique du mémoire de recherche et de la thèse de doctorat en Lettres, Arts et Sciences humaines et sociales: informations, recommandations universitaires, techniques et pratiques actuelles, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 109.
127 G. R. ASSIE & R. R. KOUASSI, Cours d’initiation à la méthodologie de recherche, École de la chambre de commerce et d’industrie, Abidjan, 2008, p. 206.
128 Think tanks, lobbies, ONG, groupes d’intérêts et associations professionnelles, l’espace public, les autres associations, les médias… et, l’État et la classe politique.
129 B. PAPE-THOMA, «Mystère, viol et dépossession: la colonisation de l’Afrique par l’Allemagne», article publié le 28 novembre 2007 sur le site www.afrik.com et consulté le 22 mars 2022. Birgit PAPE-THOMA est née à Hambourg en Allemagne. Elle est journaliste et conseillère en communication et relations publiques. Elle est également auteur de livres pour enfants et de courts récits s’adressant à un public adulte. Elle a notamment écrit un ouvrage sur L’Allemagne en collaboration avec Gaëlle Dutter et publié aux éditions Grandir qui parle de la découverte de l’Allemagne: son histoire, sa géographie, ses habitants…
130 J. BOUCHAUD, «La côte du Cameroun dans l’histoire et la cartographie. Des origines à l’annexion allemande 1884», Mémoires de l’Institut Français d’Afrique Noire, Centre du Cameroun, série: Population n° 5, 1952.
131 B. PAPE-THOMA, «Mystère, viol et dépossession: la colonisation de l’Afrique par l’Allemagne», article publié le 28 novembre 2007 sur le site www.afrik.com et consulté le 22 mars 2022.
132 Idem.
133 L’actuelle Namibie.
134 Tanzanie, Burundi, Rwanda.
135 Kamerun strasse.
136 B. PAPE-THOMA, «Mystère, viol et dépossession: la colonisation de l’Afrique par l’Allemagne». Article publié le 28 novembre 2007 sur le site www.afrik.com et consulté le 22 mars 2022.
137 C. LECLERC, «l’Allemagne aussi a un passé colonial (trop souvent oublié)», article publié le 16 août 2015 sur le site: www.Slate.fr et consulté le mardi 26 février 2019.
138 Alain FINKIELKRAUT, né le 30 juin 1949 à Paris, est un philosophe, écrivain, essayiste et animateur de radio français.
139 «Un pour le Kaiser».
140 Cour Internationale de Justice.
141 C. LECLERC, «l’Allemagne aussi a un passé colonial (trop souvent oublié)», article publié le 16 août 2015 sur le site: www.Slate.fr et consulté le mardi 26 février 2019.
142 Office colonial allemand.
143 Prince KUM’A NDUMBE III, L’Afrique et l’Allemagne. De la colonisation à la coopération, 1884-1986 (Le Cas du Cameroun), Editions AFRICAVENIR, p. 297.
144 S.H.A.T., Cameroun, carton 61, Bulletin de renseignements n°1, Activités des Allemands sous mandat britannique, 73/5, 3 septembre 1936. In Prince KUM’A NDUMBE III, op. cit, p. 297.
145 A.N.Y., APA 11224/F, Organisation militaire du Cameroun britannique, s.d. In PRINCE KUM’A NDUMBE III, op. cit., p. 297.
146 L’Association des indigènes camerounais germanophiles.
147 Les habitants de Pongo portent le même nom. Cf. A.N.Y., APA 11225/A, Menées antifrançaises, doc. Cit. Communication et correspondance adressées au département, 1933-1937. Gouverneur Bonnecarrère au Ministre des Colonies, n°120, Intrigues antifrançaises, 15 décembre 1933. In KUM’A NDUMBE III, op. cit., p. 297.
148 S.H.A.T., Cameroun, carton 61, Bulletin de renseignements n°1, doc. cit. In Prince KUM’A NDUMBE III, L’Afrique et l’Allemagne. De la colonisation à la coopération, 1884-1986 (Le Cas du Cameroun), Editions AFRICAVENIR, p. 297.
149 A.N.Y., APA 11225/A, Menées antifrançaises… doc. cit. In Prince KUM’A NDUMBE III, op. cit., p. 297.
150 A.N.Y., APA 10124/C, Menace de mort contre Gouverneur Général, espionnage, surveillance, Douala, 1939-1940. In L. I. SAH, «Activités allemandes et germanophilie au Cameroun(1936-1939)», Revue Française d’Histoire d’Outre-mer, t. LXIX (1982), n°255, pp. 131-133.
151 S.H.A.T., Cameroun, carton 61, Bulletin de renseignements n°1, doc. Cit. In Léonard I. SAH, o. cit., pp. 131-133.
152 A.N.Y., 1 AC 107 (2), Rapport sur les activités antifrançaises des Douala, 1934. Gouverneur Bonnecarrère au ministre des Colonies, rapport n° 9, (Intrigues antifrançaises), 3 févr. 1934. In Léonard I. SAH, op. cit., pp. 131-133.
153 Idem. In L. I. SAH, «Activités allemandes et germanophilie au Cameroun(1936-1939)», Revue Française d’Histoire d’Outre-mer, t. LXIX (1982), n°255, pp. 131-133.
154 Kamerunen Farbringen fur deutsche Gesinnung Verein – entendons les «Camerounais de pensée allemande».
155 A.N.Y., APA 11229/D, Manifestations anti-françaises n°85, 10 oct. 1935. In Léonard I. SAH, op. cit., pp. 131-133.
156 Tous originaires de la région côtière.
157 A. OWONA, L’évolution du Cameroun de 1884 à 1970, cours polycopié, Yaoundé, vol. 2, p. 32. In L. I. SAH, op. cit., pp. 131-133.
158 Travaux forcés, application du système de l’indigénat, etc.
159 Région d’Eséka.
160 L. I. SAH, «Activités allemandes et germanophilie au Cameroun(1936-1939)», Revue Française d’Histoire d’Outre-mer, t. LXIX (1982), n°255, pp. 131-133. Une de ces lettres est conçue et présentée de la manière suivante: «Expéditeur: Nyap Jean, chef de groupement de Ndogbessol, par Eséka Destinataire: Monsieur le Chancelier Hitler Adolph et dominateur en Allemagne. Monsieur, au Cameroun, beaucoup d’embuches vous sont tendus par les français, Moi, votre fils que vous avez délaissé ne puis m’empêcher de vous l’écrire: je suis né sous votre empire et j’accuse actuellement 35 ou 36 ans. Je vous le dis alors avec les larmes aux yeux, ce que les français font de mauvais au Cameroun et solustinent (s’obstinent) de ne plus retourner en France pour que vous veniez aussi vous installer au Cameroun jadis votre. Le mois écoulé, tous les points, chemins de fer, gare Essondo et Sodibanga furent gardés par des sentinelles et diverses équipes pour vous attendre. Je vous l’avertissons gêne (sic) sans gêne? Dans le sens: clairement, ouvertement?) pour que vous prudents et vainqueurs pour que vous repreniez votre Cameroun longtemps abandonné. J’aime beaucoup l’Allemagne. Je voudrai bien que vous reviviez (sic) (reveniez) les ordures (sic) (ordres) des français sont différents des autres (sic) (vôtres) quand j’était autrefois sous votre tutelle, je n’étais ennuyé de la sorte comme je le suis à présent. J’ai beaucoup besoin de vous écrire le plus souvent possible, mais il n’y a pas la route. Prière de me renseigner comment faire pour vous correspondre souvent. Je vous serais toujours très reconnaissant et vous me direz comment faire pour vous apprendre le plus souvent possible les nouvelles du Cameroun français maudit. Veuillez agréer? Monsieur mes salutations vavorables (sic) (favorables). Votre fils » - A.N.Y., APA 11229/D, Manifestations anti-françaises d ’indigène s, juill. 1940, Police et santé 441.
161 V. CHAVELAS, «Trente ans de colonisation allemande au Cameroun», Revue Togo-Cameroun, Paris, 1928. In R. GOUELLAIN, «DOUALA – VILLE ET HISTOIRE», Enquête réalisée avec le concours du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), Paris, Institut d’Ethnologie, Musée de l’Homme, Palais de Chaillot, Place du Trocadéro, 16ème, 1975, pp. 183-185.
162 «Gaertner» ou agents de culture.
163 «Wegebauer» ou piqueurs de route.
164 V. CHAVELAS, «Trente ans de colonisation allemande au Cameroun», Revue Togo-Cameroun, Paris, 1928. In R. GOUELLAIN, «DOUALA – VILLE ET HISTOIRE», Enquête réalisée avec le concours du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), Paris, Institut d’Ethnologie, Musée de l’Homme, Palais de Chaillot, Place du Trocadéro, 16ème, 1975, pp. 183-185.
165 B. PAPE-THOMA, «Mystère, viol et dépossession: la colonisation de l’Afrique par l’Allemagne». Article publié le 28 novembre 2007 sur le site www.afrik.com et consulté le 22 mars 2022.
166 Idem. «Un pour le Kaiser».
167 C. LECLERC, «l’Allemagne aussi a un passé colonial (trop souvent oublié)», Article publié le 16 août 2015 sur le site: www.Slate.fr et consulté le mardi 26 février 2019.
168 G. BALANDIER, Sociologie actuelle de l’Afrique Noire. Dynamique sociale en Afrique centrale, Quadrige/Presses Universitaires de France, p.7, VII.
169 Ou ethnique.
170 Ibid., p. 35.
171 Virus du Sida.
172 AEF: Afrique Équatoriale Française.
173 H. LAURENTIE, «Notes sur une philosophie de la politique coloniale française», in Numéro spécial de Renaissances, oct. 1944. In G. BALANDIER, Sociologie actuelle de l’Afrique Noire. Dynamique sociale en Afrique centrale, Quadrige/Presses Universitaires de France, pp. 15-18.
174 J. BORDE, «Le problème ethnique dans l’Union sud-africaine», in Les Cahiers d’Outre-Mer, 1950, p. 320. In G. BALANDIER, Sociologie actuelle de l’Afrique Noire. Dynamique sociale en Afrique centrale, Quadrige/Presses Universitaires de France, pp. 15-18.
175 C. LECLERC, «l’Allemagne aussi a un passé colonial (trop souvent oublié)». Article publié le 16 août 2015 sur le site: www.Slate.fr et consulté le mardi 26 février 2019.
176 Idem.
177 EEC: Église Évangélique du Cameroun.
178 C. LECLERC, «l’Allemagne aussi a un passé colonial (trop souvent oublié)», Article publié le 16 août 2015 sur le site: www.Slate.fr et consulté le mardi 26 février 2019.
179 Idem.
180 Idem.
181 M. DIPPOLD, «L’image du Cameroun dans la littérature coloniale allemande», in Cahiers d’Études africaines, Année 1973, 49, pp. 37-59.
182 A. MEMMI, Portrait du colonisé: précédé du portrait du colonisateur, Paris, 1966, p. 126.
183 Ibid., p. 123.
184 M. DIPPOLD, «L’image du Cameroun dans la littérature coloniale allemande», in Cahiers d’Études africaines, Année 1973, 49, p. 45.
185 Idem.
186 Idem.
187 Idem.
188 ANC, FA 1-37, F. 68-71. In Prince KUM’A NDUMBE III, L’Afrique et l’Allemagne. De la colonisation à la coopération, 1884-1986 (Le Cas du Cameroun), Editions AFRICAVENIR, pp. 140-141.
189 Prince KUM’A NDUMBE III, L’Afrique et l’Allemagne. De la colonisation à la coopération, 1884-1986 (Le Cas du Cameroun), Editions AFRICAVENIR, pp. 140-141.
190 F. HENNEMANN, «Werden und Wirken eines Afrikamissionars. Erlebtes und Erschautes, Pallotiner Verlag, Limburg an der Lahn» 1922, in Zentrales Archiv der Pallottiner, p. 110, 180 pages. In Prince KUM’A NDUMBE III, L’Afrique et l’Allemagne. De la colonisation à la coopération, 1884-1986 (Le Cas du Cameroun), Editions AFRICAVENIR, p. 142.
191 A. ISAACMAN & B. ISAACMAN, Dams, Displacement, and the Delusion of Development, p. 56. In Prince KUM’A NDUMBE III, L’Afrique et l’Allemagne. De la colonisation à la coopération, 1884-1986 (Le Cas du Cameroun), Editions AFRICAVENIR, pp. 143.
192 V. CHAVELAS, «Trente ans de colonisation allemande au Cameroun», Revue Togo-Cameroun, Paris, 1928. In R. GOUELLAIN, «DOUALA – VILLE ET HISTOIRE», Enquête réalisée avec le concours du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), Paris, Institut d’Ethnologie, Musée de l’Homme, Palais de Chaillot, Place du Trocadéro, 16ème, 1975, p. 186.
193 Idem.
194 G. BALANDIER, «Réflexions sur le fait politique: le cas des sociétés africaines», in Cahiers internationaux de sociologie, PUF, vol. 37, juillet-décembre 1964, pp. 23-50.
195 E. FOPOUSSI FOTSO, Faut-il brûler les chefferies traditionnelles?, Editions SOPECAM, 1991.
196 Idem.
197 C.-H. PERROT & F.-X. FAUVELLE-AYMAR, Le retour des rois. Les autorités traditionnelles et l’Etat en Afrique contemporaine, Paris, Karthala, 2003, 568 pages.
198 Les cadres, comme on dit en Côte d’Ivoire.
199 W. VAN BINSBERGEN, «Les chefs royaux Nkoya et l’association culturelle Kazanga en Zambie. Résistance, déclin ou folklorisation de la fonction du chef traditionnel?», In C.-H. PERROT et F.-X. FAUVELLE-AYMAR (éd.), Le retour des rois. Les autorités traditionnelles et l’Etat en Afrique contemporaine, Paris, Karthala, pp. 489-510.
200 Façons de penser.
201 Façons d’agir.
202 Du grec «holos»: qui forme un tout.
203 J. BAECHLER, Nature et Histoire, Hermann, 2014, 1135 pages. J. BAECHLER, Esquisse d’une histoire universelle, Fayard, 2002, 376 pages.
204 Anatomiques, morphologiques, physiologiques, évolutifs, etc.
205 Socioreligieux, psychologiques, géographiques, etc.
206 Au sens générique.
207 Faits anthropologiques comme «homo» ou «anthropos».
208 R. QUIVY & L. VAN CAMPENHOUDT, Manuel de recherches en sciences sociales, 1995, pp. 85-86, 288 pages.
209 J. CHEVRIER, La littérature nègre, Étude (broché), 2003, pp. 53-54.
210 F. FORTIN, Le processus de la recherche: de la conception à la réalisation, 1996, p. 51.
211 G. MACE & F. PETRY, Guide d’élaboration d’un projet de recherche, 2000, p. 24.
212 R. QUIVY & L. VAN CAMPENHOUDT, Manuel de recherches en sciences sociales, 1995, pp. 85-86, 288 pages.
213 C. BERNARD, Introduction à l’étude de la médecine expérimentale, 1865, 238 pages.
214 Idem.
215 G. R. ASSIE & R. R. KOUASSI, Cours d’initiation à la méthodologie de recherche, École de la chambre de commerce et d’industrie, Abidjan, 2008, p. 20.
216 M. WEBER, Le savant et le politique, Paris, Edition 10-18, 2006, p. 87.
217 A. GROSSER, L’explication politique, Paris, Presse de la FNSP, 1972.
218 G. M. AMOUGOU, «L’utilité d’une coopération technique au Sud du Sahara: Cas de la relation Cameroun-UNESCO», Mémoire de DEA en Science Politique, Université de Yaoundé II, 2009, p. 184.
219 G. MACE & F. PETRY, Guide d'élaboration d'un projet de recherche en sciences sociales, Les Presses de l'Université de Laval Québec, 2000, p. 30.
220 M. BEAUD, L'art de la thèse, Paris, La Découverte, 2001, p. 50.
221 A. FILON, De la méthode historique, Hachette Livre, 1840, p. 1.
222 I. LO, Méthodologie de la recherche en sciences sociales, 2007, p. 1, 36 pages.
223 R. QUIVY & L. VAN CAMPENHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Dunod, Paris, 1995, p.
224 M. GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 1996 (10ème édition), pp. 351-352.
225 Idem.
226 Idem.
227 G. HERMET et AL., Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques, Paris, 2015 (8ème édition), p. 174.
228 C. TILLY, Big Structures, Large Processes, Huge Comparisons, New York, Russell Sage Foundation, 1984.
229 M. GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 1996 (10ème édition), p. 422.
230 M. MAUSS & P. FAUCONNET, « LaSociologie, objet et méthode », Article extrait de La Grande Encyclopédie, 1901, p. 22.
231 E. DURKHEIM, Les règles de la méthode sociologique, Paris, 1ère édition, préfacé chez ALCAN, 1895.
232 J.-L. LOUBET DEL BAYLE, Intr oduction aux méthodes des sciences sociales, p. 182 .
233 Ce type de comparaison est généralement appliqué dans les études internationales. Sur le plan théorique, consulter avec profit, M. DOGAN, D. PELASSY, 1980. La comparaison internationale en sociologie politique, Paris, Librairies Techniques, pour une application au Cameroun. Lire L.-M. NKOUM-ME NTSENY, La dualité culturelle dans la politique étrangère : une étude comparée entre le Cameroun et le Canada, Thèse, Relations internationales, Université de Yaoundé II-SOA-IRIC, 1997-1998, pages 139 et suivantes.
234 Nombre de structures éducatives, sanitaires, commerciales et militaires financées par l'Allemagne, nombre de résidents étrangers, nombre de révoltes, nombre d'ouvrages, de recueils écrits, d'études iconographiques faites.
235 J.-L. PIAGET, La naissance de l’intelligence chez l’enfant, Paris, Delachaux et Niestlé, 1936; La construction du réel chez l’enfant, Paris, Delachaux et Niestlé, 1937. Voir Wikipédia, « Constructivisme (psychologie)(n. d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 25 mars 2022.
236 Idem.
237 Ontogenèse.
238 LA TOUPIE, « Définition: Constructivisme », article tiré du site www.latoupie.org et consulté le 25 mars 2022.
239 P. L. BERGER & T. LUCKMANN, The Social Construction of Reality. A treatise in the sociology of knowledge, Anchor, 1966, 240 pages.
240 LA TOUPIE, « Définition: Constructivisme », article tiré du site www.latoupie.org et consulté le 25 mars 2022.
241 Sur ce point, leur constructivisme social s’inspire de l’approche phénoménologique, en particulier d’Alfred SCHUTZ qu’ils rapprochent du projet de la sociologie de la connaissance.
242 B. CYRULNIK, Un merveilleux malheur, 1999. LA TOUPIE (n.d.), article tiré du site www.latoupie.org et consulté le 25 mars 2022.
243 Taken for granted.
244 « Alfred Schutz, philosophe des sciences sociales autrichien (n.d.) ». Article publié sur le site www.wikipédia.fr et consulté le 25 mars 2022.
245 M. CROZIER & E. FRIEDBERG, L’acteur et le système, 1977, p. 1, 436 pages.
246 Pour Pierre BOURDIEU, l’habitus s’apparente à une partie de la structure sociale, inconsciente à l’individu et déterminé par les échanges entre les individus. Il s’agit simplement d’un ensemble de structures structurées prédisposé à fonctionner comme des structures structurantes. Voir P. BOURDIEU, La Noblesse d’Etat. Grandes écoles et esprit de corps, Les Editions de Minuit, 1989, 576 pages; Voir M. GRAWITZ, Lexique des sciences sociales, Paris, Dalloz (8ème édition), 2004, p. 57, 422 pages.
247 A. AHIDJO & G. BWELE, L’Encyclopédie de la République Unie du Cameroun, Tome Deuxième: L’Histoire te l’Etat, Douala, Les Nouvelles Editions Africaines, p. 52.
248 M. GRAWITZ, Méthodes des Sciences Sociales, Paris, Dalloz, 1996 (10ème édition), pp. 477-479.
249 J.-L. LOUBET DEL BAYLE, Introduction aux méthodes des sciences sociales, Toulouse, Privat, 1986, p. 22.
250 D. EASTON, Analyse du système politique, Paris, Armand Colin, 1974, p. 2.
251 J.-L. LOUBET DEL BAYLE, Introduction aux méthodes des sciences sociales, Toulouse, Privat, 1986, p. 102.
252 P. CIBOIS, L'analyse factorielle, Paris, PUF, 1983, p. 128 et surtout du même auteur, L'analyse des données en sociologie, Paris, PUF, 1984, pp. 69-74.
253 J.-L. LOUBET DEL BAYLE, op.cit., 1986, p. 112.
254 M. GRAWITZ, Méthodes des Sciences Sociales, Paris, Dalloz, 1996 (10ème édition), p. 526.
255 J.-C. COMBESSIE, La méthode en sociologie, 4ème édition, Paris, La Découverte, p. 14, 123 pages. Sans document, aucune recherche n'est possible. Voir également L. ALBARELLO et al., Pratiques et méthodes de recherche en sciences sociales, Paris, Armand Colin, 1995, p. 9.
256 G. BALANDIER, Sens et puissance. Les dynamiques sociales, Paris, PUF, 1971.
257 G. HERMET & Al., Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques, Paris, 2015.
258 D. EASTON, Analyse du système politique, Paris, Armand Colin, 1974.
259 Ananie BINDJI: Journaliste/Directeur de l’Information de la chaine audiovisuelle camerounaise Canal 2 International.
260 Albert François DIKOUME: Historien, Spécialiste d’Histoire Économique et Sociale. Ancien chef du département d’histoire de l’Université de Douala.
261 Jean-Jacques ANNAUD: Réalisateur du film «La victoire en chantant», Novembre 2014.
262 Spécialiste de l’ethnie Duala.
263 www.goetheinstitut.de
264 www.filmkraft.net
265 www.fondationafricavenir.org , Fondation AfricAvenir International, Douala.
266 Interview de Jean-Pierre BEKOLO, réalisée par Mérinos LIATOU, disponible sur le site www.goetheinstitut.de et consultée le 29 mars 2022. La série «Our Wishes: un regard sur l’Afrique coloniale» a été réalisée en 2017.
267 C. LESQUENE, «Comment penser l'Union Européenne?» In M.- C. SMOUTS (dir), Les nouvelles relations internationales. Pratiques et théories, Paris, Presses de Science po, 1998, pp. 103-134.
268 Idem.
269 J.-P. DURAND & Robert WEIL, Sociologie contemporaine, op. Cit., p. 308. Sur les développements théoriques relatifs à cette technique de recherche, consulter également, R. GHIGLIONE & B. MATALON, Les enquêtes sociologiques. Théories et pratiques, op.cit., pp. 90-93; A. BLANCHET, L'entretien de recherche dans les sciences sociales, Paris, Dunod, 1985, 290 pages; A. BLANCHET & R. GHIGLIONE & J. MASSONAT & A. TROGNON, 1987, Les techniques d'enquête en sciences sociales, Paris, Dunod, pp. 80-84.
270 Radio, Télévision, Internet, etc.,
- Quote paper
- Patricia Etonde (Author), 2022, L'administration coloniale allemande et les pouvoirs politiques traditionnels Duala et Bamoun. Analyse de l'histoire politique du Cameroun, Munich, GRIN Verlag, https://www.grin.com/document/1268762
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